#01- LE GRIMOIRE DES SOUHAITS
Scénariste(s) : François DEBOIS
Dessinateur(s) : Montse MARTIN
Éditions : Glénat
Collection : Grafica
Série : Talisman
Année : 2009 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre
Genre(s) : Fantastique
Appréciation : 5 / 6
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N'est-il pas risqué d'abuser de la magie?
Écrit le vendredi 06 novembre 2009 par PG Luneau
Pour ses quarante ans, le groupe des éditions Glénat a décidé de publier quarante nouvelles séries! Initiative fort louable, puisque quarante nouveaux scénaristes et quarante illustrateurs verront ainsi leur première œuvre publiée! Talisman est l’une de ces œuvres… et la qualité est au rendez-vous! Quelle excellente surprise que cet album!
Tara est une jeune fille comme les autres, si ce n’est que son père est un écrivain reconnu qui bûche avec peine sur son prochain roman, ce qui le force à s’enfermer des mois durant dans son bureau sans plus s’intéresser à elle. Quand, enfin, il finit son manuscrit et sort de sa torpeur, la joie de la jeune fille est de courte durée. En effet, le jour même du lancement officiel, son père tombe dans un étrange coma que les médecins n’arrivent pas à expliquer!
Cette situation pousse Tara et sa mère à des extrêmes fort déplaisants : elles doivent vendre leur belle demeure, et Mme MacGill doit se mettre à travailler en double à son petit restaurant afin de trouver l’argent nécessaire à l’hospitalisation de son mari. Tara doit elle aussi se donner à fond afin d’aider sa mère, même si ça soulève la risée de ses confrères de classe. La riche et prétentieuse Mathilde Delombe n’hésite pas une seconde à la ridiculiser en la traitant de tous les noms… Sans compter qu’elle souhaiterait bien mettre le grappin sur le beau Tom, l’ami d’enfance de Tara. La tension est telle que Tara ne sait plus où donner de la tête.
Jusqu’au jour où, par hasard, elle découvre un petit coffre en bois appartenant à son père et contenant de bien étranges artefacts. D’abord, une photo prouvant que son père était très copain avec les pères de Mathilde et de Tom. Puis, une cape qui, apparemment, permettrait d’exaucer tous les vœux! Il n’en faut pas plus pour redonner espoir à la jeune fille… mais se peut-il que ça soit si simple? Que Tara n’ait qu’à souhaiter la guérison de son père pour que tout revienne comme avant? La cape semble avoir ses propres règles, son propre modus operandi… et si son utilisation entraînait des effets secondaires? Se pourrait-il qu’elle soit la cause du coma de M. MacGill?! Chose certaine, Nola, la folle du village, semble reconnaître cette cape, et aimerait bien que Tara la lui laisse observer plus en détail…
Beaucoup de mystères, des personnages aux interactions riches, des secrets de jeunesse, des touches de fantastique qui s’introduisent tout doucement dans le quotidien des habitants d’une petite ville de bord de mer… Finalement, cette histoire a tout ce qu’il faut pour gagner mes faveurs. Un récit tout public fort attachant, qui débute lentement, mais qui s’annonce diablement intéressant. Vivement la suite!
Plus grandes forces de cette BD :
- le dessin est d’un superbe classicisme. Le visage de Tom ressemble beaucoup à celui de Julien Boisvert, le héros de Plessix, et plusieurs personnages rappellent les films de Disney. Doit-on se surprendre que la talentueuse dessinatrice ait été formée dans les studios espagnols de ce géant américain ?
- les chats sont joyeusement dessinés. On les croirait tous directement sortis du film les Aristochats, encore de Disney. D’ailleurs, on en a la preuve à la page 47 (troisième vignette), alors qu’on y voit un évident clin d’œil à Berlioz, Toulouse et Marie, les trois chatons de Duchesse.
- un récit qui laisse planer d’intéressants mystères et entrevoir de palpitantes possibilités. Qu’en est-il de la relation entre les trois pères? La mère de Tara n’était-elle pas une source de conflit pour ces trois vieux amis, du temps où ils étaient collégiens? Pourquoi le père de Mathilde en veut-il tant à celui de Tara? Quel rôle la cape aux souhaits a-t-elle eu dans la vie de ces trois hommes? Et à quel prix? Oui vraiment, vivement la suite!
- les personnages sont suffisamment nombreux pour assurer un réel tissu social. Le fait que trois familles soient impliquées permet de monter le nombre de personnages actifs à huit!! C’est certain qu’on ne sait pas encore tout d’eux, bien loin s’en faut, mais le fait que le récit est relativement lent nous permet de nous attarder aux réactions, attitudes et regards de chacun, de nous forger nos propres hypothèses pour les expliquer et de découvrir ainsi la complexité de leur personnalité. On pourrait presque dire que le sous-texte est riche!
Ce qui m’a le plus agacé :
- le titre de la série et celui du tome, qui n’ont rien à voir, pour le moment, avec le récit. Le seul item magique que l’on retrouve dans cet album, c’est la cape, que je ne qualifierais pas de talisman… Et s’il y a bien un livre mystérieux, après lequel quelques personnes courent avec avidité, rien ne nous laisse présager qu’il s’agisse d’un grimoire des souhaits… En fait, comme l’album se termine au moment même où Tara s’apprête à l’ouvrir, j’ai l’impression que le titre a été donné un tome trop tôt!!
- la lenteur du récit. Il s’agit d’un premier tome qui doit, bien évidemment, mettre les choses en place, mais c’est ici un peu exagéré. Il y a trop d’emphase mise sur les ambiances au détriment de l’action. Oui, on a compris que la pauvre petite Tara fait pitié, qu’elle est ridiculisée par ses pairs parce que sa mère trime dur pour la faire vivre et parce que son père est comateux… Toute la section contenue entre les pages 12 et 24 aurait, à mon avis, mérité d’être resserrée ou, du moins, redynamisée.
- la représentation un peu surfaite de la proverbiale méchanceté des jeunes. Personnellement, en plus de vingt ans de carrière auprès de cette clientèle, j’ai vu des jeunes rire méchamment de leurs pairs à cause de caractéristiques physiques ou de situations épisodiques difficiles («Aaah! Juliette a des poux!»). Mais je n’ai jamais eu connaissance que des jeunes aient été insensibles au point de se moquer de la maladie ou du décès d’un parent d’un autre élève…
- les chats aux muscles surhumains. C’est un peu fort, une dizaine de chats qui soulève et transporte une personne! Pas à bout de bras, comme dans les dessins animés genre Yogi l’ours, non non! Une dizaine de vrais chats, qui marchent à quatre pattes, mais qui se collent côte à côte pour former un genre de plate-forme mouvante, de tapis roulant félin !?!? Même si la personne en question est une jeune fille d’une dizaine d’années assez menue, je n’y crois pas une minute, et ce n’était pas nécessaire: le côté fantastique de l’invasion des chats, lors du party final, se suffisait à lui-même pour nous faire comprendre qu’une certaine magie était en opération!
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