#03- NOMADES
Scénariste(s) : Sylvain RUNBERG
Dessinateur(s) : Serge PELLÉ
Éditions : Dupuis
Collection : Repérage
Série : Orbital
Année : 2009 Nb. pages : 56
Style(s) narratif(s) : Diptyques
Genre(s) : S.F.
Appréciation : 5 / 6
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Là où il y a de l'Homme, il y a de l'hommerie... mais là où il y a des extraterrestres, qu'y a-t-il?
Écrit le lundi 21 août 2017 par PG Luneau
Tomes lus : #03- Nomades
#04- Ravages (2010, 5,5 /6)
#05- Justice (2012, 5,5 /6)
#06- Résistance (2014, 5,5 /6)
J'ai enfin pris le temps de me replonger dans le passionnant monde d'Orbital, cette station intersidérale qui sert de point de rencontre à toutes les races de l'univers connu... et, surtout, à chacune des 781 espèces faisant partie de l'ODI, l'Office Diplomatique Intermondial... organisme pro-paix où travaillent les agents Caleb Swany et Mézoké Izzua!
Lors de leur première mission, nos deux amis ont eu bien des difficultés à régler le conflit entre les Jävlodes de la planète Upsall et les humains en exil installés sur Senestam, une de leurs lunes. Ça avait frôlé la catastrophe, mais Angus, le vaisseau-organique, avait pu sauver la donne in extremis...
Dans la mission suivante, Caleb et Mézoké doivent superviser le bon déroulement des cérémonies officielles de réconciliation de leurs deux peuples respectifs, rien de moins! Ayant lieu à Kuala Lumpur, sur la Terre, ces festivités ne font pas l'unanimité, et les Isolationnistes terriens (des terroristes qui militent violemment contre la présence des extraterrestres et, donc, contre l'O.D.I.!) préparent sûrement une offensive! Pourtant, ce qui frappe les côtes de la capitale malaysienne, c'est plutôt une horrible aura de destruction invisible qui file en droite ligne, en désagrégeant littéralement tout sur son passage!! Une arme bactériologique secrète? Un virus imparable?? Chose certaine, les Rapakhuns, cet étrange peuple de nomades nouvellement débarqué dans les environs, semblent être le vecteur de cette calamité. Volontairement ou non? C'est à découvrir dans les tomes #3 et 4 de cette toujours aussi passionnante série.
Ce faisant, vous découvrirez également que l'Office Diplomatique Intermondial n'est pas aussi uni, digne, fraternel et utopique qu'il le laisse paraître!! Et les deux tomes suivants (les #5 & 6, qui forment, eux aussi, un récit à peu près complet) vous confirmeront que la magouille, la jalousie, les tromperies et le pouvoir peuvent corrompre autant les Humains que les Achérodes ou n'importe quels autres peuples de l'univers! En effet, c'est le foutoir total au sein de l'ODI : suite au procès interne des agents Caleb et Mézoké, puis à l'incarcération de la dignitaire primale Evona Toot, c'est le machiavélique conseiller Ekkhlid qui prend le pouvoir. Il crée ainsi un schisme au sein de l'organisme, et nos amis peuvent profiter de cette crise politique et diplomatique majeure pour s'enfuir, le temps de panser leurs plaies... Car Caleb ne va vraiment pas bien, la mission précédente ayant laissé des séquelles inimaginables! De plus, son passé le rattrapera bientôt, et le forcera à investiguer d'avantage sur un drame survenu dans son enfance... Ce qu'il découvrira ne lui plaira pas et, dans l'état où il se trouve, ça deviendra assez dangereux d'être dans ses parages!!? :^0
Ces scénarii complexes de Sylvain Runberg (mais j'arrive encore à suivre, c'est donc bon signe!!) sont toujours merveilleusement servis par les designs soignés et originaux de Serge Pellé. Comme pour les tomes précédents, ses dessins rallient la versatilité de Mézières, la palette estompée des couleurs de Bilal... et la grandeur de Schuiten!
Avec le tome 6 qui se termine sur une apothéose flamboyante (et une ou deux révélations sidérantes!!) et le tome #7, déjà sorti, qui s'intitule Implosion, je me doute que les fans de la série doivent attendre le tome #8 avec impatience, question d'atténuer l'angoisse insoutenable générée par ce thriller haletant! Je suis avec eux de tout cœur!! ;^) À partir de 14 ans.
À lire aussi : mes critiques des tomes #1 & 2, ainsi que les critiques que mon ami Yaneck a faites des tomes #3, 4 & 5.
Plus grandes forces de cette BD :
- la splendeur des designs. Et j'aimerais préciser que le terme splendeur n'est pas, ici, un superlatif utilisé pour être poli! Tous les éléments futuristes y sont fascinants de crédibilité: les vaisseaux et toute leur technologie, les édifices et bâtiments des différentes planètes, tant celles à caractère rural que celles technologiquement très avancées, les diverses races d'aliens ou de bestioles... même les œuvres d'art sont fabuleuses et originales!! Pellé est vraiment un artiste de grand talent... et ses couvertures nous en jettent plein la vue! Chapeau! Mon coup de cœur spécial va à Mékline, l'extraterrestre blobiforme dont les membres - incluant la tête - sont rattachés à son corps par de complexes connexions technologiques (tome #6, p.11, notamment)!! Cool!!
- la taille des albums. Ce grand format (24 x 32 cm) laisse toute la place nécessaire à Pellé pour nous éblouir de ses merveilles! ;^)
- la belle complexité du scénario. Malgré que j'aie parfois quelques difficultés à suivre (mais, vous le savez, ce n'est jamais simple, pour moi, de décortiquer les scénarii emberlificotés!:^S), je suis parvenu, jusqu'à présent, à me faire un tableau que je crois assez juste des principales forces en présence... et une bonne partie de leurs ramifications! Une fois admis que tout n'est ni noir, ni blanc, qu'il y a des roublards partout et que même les personnages centraux ont leur part d'ombre, on s'y retrouve assez bien. Cérémonies totalement bidon et procès factices, mensonges et magouilles partout: c'est la dure réalité de la vie...:^(
- les Rapakhuns. Ils constituent une allégorie très intéressante sur la présence des migrants ou, mieux encore, des Roms. Les réactions des humains à leur égard trouvent tellement de résonnance dans l'actualité! On n'a qu'à penser à la multitude d'avis partagés lors de la récente crise des migrants syriens!...
- la cohérence du scénario. Elle est renforcée par d'intéressants retours sur les événements des premiers tomes. À ce propos, il serait important de relire la première mission avant de plonger dans celles-ci! Je ne l'avais pas fait, de prime abord, et ça a un peu nui à ma compréhension de la situation globale!:^S
- les très intéressants retours dans le passé des principaux protagonistes. Tous y passent: Caleb, Mézoké... même Nina!! On les voit, plus jeunes, à des moments marquants de leur vie. L'enfance et l'adolescence de Caleb nous permettent de comprendre l'importance, pour lui, de l'acceptation de la race humaine au sein de l'ODI, puis on comprend pourquoi les relations entre Mézoké et les siens sont plutôt tendues et comment Nina est devenue pilote de névronome.
- de fameux flashes futuristes! Outre l'idée de faire à peu près tout fonctionner avec l'anti-G (bateaux, véhicules, sièges... et même verres!!), les auteurs ont fait preuve de beaucoup d'ingéniosité pour peaufiner leur univers: pilote connecté à son vaisseau par les cheveux (!!?), compétitions sportives inter-religions (quelle belle idée d'endiguer les querelles religieuses à l'aide de rivalités sportives!), masques holographiques (d'une insanité troublante - un clin d'œil au Joker?? ;^), race pouvant expulser des phéromones enjôleurs... Plein d'idées au potentiel très riche!
- les ambiances, merveilleusement bien rendues. On sent l'angoisse quand le varosash fait des siennes, on est totalement ambivalents face à la confiance à accorder aux étranges Rapakhuns ou aux terroristes aux masques de clowns sinistres! On est aussi essoufflés que Mézoké lors de son commando pour aller récupérer son partenaire et pendant leur fuite folle! Bref, on est bien accrochés! ;^)
- les innombrables punchs et révélations des tomes #5 et 6!! Qu'est-ce que ça déboule à partir du tome #5!! C'est fulgurant! ATTENTION, DIVULGÂCHEURS: Nos deux amis en fugue (sur une superbe colonie agricole, d'ailleurs, et avec des Sandjaars blancs!?), un traitre dans l'entourage de Caleb... Caleb qu'on avait laissé pour mort, d'ailleurs, mais qui se retrouve connecté à Angus, mais infecté par un varosash!!? On rajoute à cela les Achérodes en guerre ouverte, un important personnage qui meurt... et la toute dernière vignette du tome #6, qui annonce une catastrophe imminente... Ouf!! C'est quelque chose!! Et c'est génial: on en redemande!! ;^)
Ce qui m'a le plus agacé :
- quelques séquences difficiles à interpréter. Par souci d'efficacité scénaristique, Runberg nous intercale souvent des scènes incompréhensibles sur le moment qui ne trouveront leur éclairage que plus loin... En soit, c'est excellent! Mais, souvent, je devais relire ces scènes plusieurs fois avant de les comprendre minimalement! Ce fut le cas lors du retour en arrière des p.26 à 29 du tome #3, quand on voit Caleb et sa sœur adolescents. Pour ce qui est des scènes d'attaque, c'est encore pire! Presque systématiquement, elles sont incompréhensibles!! C'est le cas pour les p.33-34 du tome #3, puis pour les p.15 à 17 du tome #6... Elles sont carrément impossibles à décortiquer! Tant qu'à y être, que signifie ce gros plan sur une fermeture éclair, dans le haut de la p.40 du tome #4?? Je cherche encore!!?...:^S
- la surabondance de races... mais jamais (ou très rarement) en groupements homogènes! J'en parlais aussi dans ma critique de la série Tessa, agent intergalactique... Dans une foule, lors d'un festival de jazz, par exemple, on peut croiser un couple asiatique, une famille latino, un groupe d'amis maghrébins... Pourquoi, dans une foule intergalactique, où des centaines de races différentes se croisent... chacun est-il le seul de sa race?? Ça doit être grisant, pour un dessinateur, de créer des centaines de variétés de créatures différentes, mais c'est aussi permis d'en dessiner parfois deux ou trois de la même espèce: ça n'en serait que plus réaliste!!:^(
- de petits accrocs. Un premier, visuel : l'homme non identifié, qui assiste à la cérémonie d'inauguration du temple achérode, avec sa minerve (au début du tome #5), ressemble trop à Caleb! Comme on sait que ce dernier est blessé, la minerve semble tout à fait de circonstance. C'est confondant! Puis, il y a cette image d'Evona Toot, sur l'écran holographique de la p.47, dans le tome #6... Qu'est-ce qu'elle fait là?? Ça semble être elle qui parle à Ekkhlid, alors que c'est son rival absolu!?! J'ai cru un moment à une autre entourloupe, du type agent triple!!? C'est déjà assez complexe comme ça sans qu'on n'en rajoute!! Mais qui est donc ce dignitaire si ce n'est Toot, ou quelle image aurait-on dû voir à la place de celle-ci?? Finalement, une exagération un peu trop hollywoodienne: les habiletés de Mézoké, lorsqu'elle joue les Spiderwomen en se lançant dans le vide et se raccrochant à gauche et à droite, ainsi que ses IMMENSES compétences de combat (seule contre 7 soldats armés aux p.42-43 du tome #5) sont carrément trop efficaces pour être crédibles! Dommage!!
- deux coquilles dans le tome #5. D'abord, on y reparle de la ville de Shirbruck (p.20), visitée au cours de la première mission... Le problème, c'est que cette ville s'épelait alors Shirebruk!! Problème d'archivage d'informations, messieurs les auteurs??;^) Puis, dans la première bulle de la p.26, on a effacé un mot qu'on a, manifestement, oublié de réécrire!! Ça donne: «Dommage qu'il faille ___ Angus soit au plus mal pour que tu daignes rendre visite à ton vieil ami Dernid!»
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