#01- DÉTECTIVE CONAN
Scénariste(s) : Gosho AOYAMA
Dessinateur(s) : Gosho AOYAMA
Éditions : Kana
Collection : X
Série : Détective Conan
Année : 1994 Nb. pages : 192
Style(s) narratif(s) : Courts récits (Manga)
Genre(s) : Aventure policière, Fantastique humoristique, Hommage, Thriller fantastique
Appréciation : 5.5 / 6
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Comment ne pas craquer pour ce Sherlock japonais en culotte courte?!
Écrit le jeudi 23 août 2012 par PG Luneau
Tomes lus : #1, 2, 3 et 4
Shinichi Kudo est un jeune homme très brillant. À seulement 17 ans, il est tellement futé qu’il parvient à résoudre les enquêtes les plus complexes, à la manière de son héros de toujours, Sherlock Holmes. Il est si fort que les meilleurs inspecteurs de police de Tokyo se réfèrent à lui et viennent lui demander de leur prêter main forte!
Seulement voilà : à force de tourner autour du monde interlope, ça peut nous occasionner des petits problèmes! Ainsi, Shinichi se fait surprendre par deux mystérieux Hommes en noir, alors qu’il était témoin d’une louche transaction pas trop catholique! Mais plutôt que de le tuer, les deux malfrats décident de tester sur lui un nouveau poison qu’ils viennent de mettre au point mais qu’ils n’ont encore jamais utilisé sur un humain. Ça y est, c’en est fini de Shinichi…
En effet, à son réveil, le jeune homme n’est plus… en lieu et place, on trouve un jeune bambin de six ans parfaitement ahuri!!! Plutôt que de le tuer, le poison expérimental a ramené Shinichi plus de dix ans en arrière!!!? Ses grandes habiletés intellectuelles et sa passion pour les mystères, les énigmes et les crimes n’ont été en rien altérées, mais tout ce qu’il fera, dorénavant, il faudra que ce le soit en tant que petit garçon!
Pris au dépourvu, le (tout!) jeune homme file chez son voisin, le docteur Hiroshi Agasa, un vieux savant bricoleur qu’il met dans le coup. Ensemble, ils décident de taire à tout le monde sa réelle identité, question de ne pas ameuter les Hommes en noir et mettre ses proches en danger. Toujours avec la complicité du vieux docteur, Shinichi se rebaptise Conan Edogawa et trouve à se loger chez Ran Mouri, sa petite amie du collège, prétextant que «ses parents sont partis pour un voyage autour du monde». Grâce à sa nouvelle situation, Conan pourra suivre Ran et, surtout, monsieur Mouri, son père, un détective privé plutôt miteux, alcoolo sur les bords et parfaitement idiot. Ainsi, le gamin continuera d’exercer sa passion : la résolution d’énigmes… mais tout en essayant de passer inaperçu et de faire en sorte que ses ingénieuses solutions aient l’air de sortir de la caboche de cette andouille de Kogoro Mouri!
En outre, quand il n’est pas en mission avec ses nouveaux logeurs, Conan se doit d’aller à l’école… en première année!!! Par la force des choses, et question de passer le temps (car refaire sa première année à dix-sept ans, bonjour l’ennui!!), il s’accoquine avec trois autres gamins, Ayumi, Mitsuhiko et Genta, et joue, avec eux aussi, à résoudre les mystères qui leur passent sous le nez : qu’en est-il de cette vieille maison hantée? Et de ce message codé trouvé par erreur?…
Malgré cette prémisse cousue de fil blanc, j’ai totalement accroché à cette «petite» série… rendue au tome #68!!! J’ai trouvé le petit bonhomme sympathique et bien entouré, surtout avec le docteur Agasa, qui le fournit en gadgets en tout genre. J’ai surtout adoré suivre les raisonnements issus de son brillant cerveau, et tenter de dénouer les énigmes avant (ou plus réalistement en même temps que) lui!… Sans grand succès, je dois humblement l’avouer, mais avec toujours énormément de plaisir! J’ai adoré faire un Poirot ou un Holmes de moi-même… car Conan utilise autant sa logique que son sens aigu de l’observation!
Un petit coup d’œil au Net m’a appris que la série est aussi très populaire au Japon, où elle se décuple en jeux vidéo, en dessins animés (longs métrages autant que séries télé) et même en films et séries télé avec de véritables comédiens!!... Et je dois dire que les images que j’en ai vues sur YouTube m’ont bien fait sourire : les comédiens sont très ressemblants aux personnages dessinés, et le tout à des airs de séries B un peu maladroite qui, ma foi, cadre bien avec l’aspect somme toute relativement festif de la BD… malgré les quelques meurtres plutôt sanglants qu’on y retrouve!!
J’aurais situé le lectorat idéal de cette série entre 13 et 15 ans, mais deux facteurs me force à l’étirer un peu : d’abord, l’âge des «participants» au courrier des lecteurs. J’ai été très surpris de constater que près du tiers de ceux qui y envoient dessins ou commentaires ont entre 19 et 25 ans!!? Je ne m’attendais vraiment pas à ça, surtout à cause de l’allure très enfantin et caricatural du héros. Le deuxième facteur qui me force à rallonger l’âge recommandé, et bien... c’est que je suis personnellement fou de cette série, même à 44 ans!!! Donc, j’en conclus que Détective Conan est une série pour les 13 à 73 ans… et peut-être même plus!! ;-)
À lire aussi : la critique un peu plus mitigée de Yaneck.
Plus grandes forces de cette BD :
- le rabat des couvertures, où le bédéiste se dessine, de façon tout à fait cartoonesque, et toujours tué d’une manière différente : poignard, balle de revolver, immolation par le feu, empoisonnement… C’est burlesque et cocasse, tout à fait dans le ton de la série!
- la qualité générale des énigmes. En effet, j’ai été très agréablement surpris par leur belle accessibilité malgré leur intéressant degré de difficulté! Des intrigues de ce genre peuvent facilement être très complexes et difficiles à suivre, ou, au contraire, ridiculement niaises (souvenez-vous des Scooby Doo de notre enfance!!). De plus, le risque de dénouement parfaitement tiré par les cheveux est très élevé. Ici, c’est généralement très bien dosé : juste assez d’humour et de mystère, un tout petit soupçon de gore, des intrigues avec une bonne logique interne et juste ce qu’il faut d’indices pour nous mettre sur la piste sans que la «solution» paraisse évidente! C’est excellent, varié, et ça met nos petites cellules grises à contribution… sans nous prendre la tête!! Mon enquête préférée? Celle qui couvre plus de la moitié du troisième tome, avec la grande famille Hatamoto en croisière sur un paquebot. Cette histoire familiale, en huis-clos, est palpitante et rappelle à bien des égards les énigmes que Marple et Poirot résolvent, dans les romans d’Agatha Christie!
- le fait que chaque volume contienne trois ou quatre enquêtes «fermées», c'est-à-dire que monsieur Aoyama ne nous laisse jamais en plan à la fin d’un tome (du moins, pas dans les quatre premiers!), contrairement à tous ces mangakas qui nous obligent à acheter le prochain tome de leur série pour accéder à la conclusion d’un récit!! Ici, chaque tome présente plusieurs mystères complets et résolus, et quelqu’un qui ne s’intéresserait pas à la grande quête de Conan (qui cherche, à travers tout ça, à retrouver la piste de ceux qui l’ont rajeuni, espérant ainsi découvrir un éventuel antidote!) pourrait fort bien ne lire qu’un seul tome sans avoir lu les précédents, ce qui, en soit, est un gros plus (surtout pour une série de plus de soixante tomes!!)!
- la présentation, en fin de tome, des plus célèbres héros de la littérature policière! Monsieur Aoyama est si passionné par ce genre littéraire qu’il a tenu à nous présenter tous ces personnages futés, perspicaces, observateurs et d’une logique implacable qui ont nourri (et nourrissent encore!) son imaginaire! Ces petites fiches explicatives nous permettent de rencontrer certains grands classiques (Sherlock Holmes, Arsène Lupin…) mais aussi d’autres moins connus, ou méconnus chez nous, comme Kogoro Akechi, un détective très populaire au Japon. À la fin de chacune de ces fiches, l’auteur nous précise le titre du roman de cette série qu’il juge le mieux réussi. Quelle belle façon de nous faire découvrir de nouveaux auteurs et de nouveaux détectives!?
- la présence, à la fin des premiers tomes, de pages de présentation des principaux personnages. Sans trop rien nous apprendre de neuf de ce qu’on avait déjà appris sur eux depuis le début de la série, ces pages restent un bon aide mémoire pour retrouver rapidement le nom de tel personnage ou certains traits de son caractère dont on ne se souviendrait plus, par exemple!
Ce qui m’a le plus agacé :
- l’horrible brutalité du premier meurtre! Dès le premier chapitre de la série, l’auteur frappe fort : rien de moins qu’une décapitation lors d’un tour en montagnes russes!!! On peut difficilement trouver plus impressionnant comme image marquante!! Malheureusement, juste à cause de ce «léger» détail, je ne peux plus présenter cette série à mes élèves de neuf ou dix ans!! Snif!… (Heureusement que je peux, moi, continuer à la lire, par contre!!)
- tout l’aspect scénaristique qui traite de comment Shinichi tente de masquer son rajeunissement et de couvrir la disparition de son double de 17 ans! Cet élément de la mise en place est complètement tiré par les cheveux et mine sérieusement la crédibilité du récit! Je déteste cette volonté tout à fait artificielle, forcée, dont fait preuve Conan à cacher son incroyable aventure à Ran, sa meilleure amie! En quoi le fait qu’elle sache qu’il est bel et bien Shinichi en plus jeune la mettrait-elle en péril?? Surtout qu’elle prouve à maintes reprises qu’elle a tous les atouts qu’il faut pour se défendre… bien mieux que Conan!! En fait, ce qui est important, c’est que les deux Hommes en noir n’apprennent jamais que l’ado à qui ils ont administré leur poison est toujours vivant!?! De plus, je trouve très difficile à avaler le fait que Ran et son père acceptent de garder ce gamin (qu’ils ne connaissent ni d’Ève, ni d’Adam!), «le temps que ses parents (qu’ils ne connaissent pas plus!!) sont en voyage autour du monde», sans poser plus de questions que ça!! Pour quelques jours, une semaine ou deux, je ne dis pas… mais après trois ou quatre mois, il me semble que je commencerais à trouver cela très louche, si j’étais eux!! Et lors de son inscription, à l’école?? La direction ne leur a pas exigé de documents légaux attestant son origine?? C’est très bancal, tout ça, et c’est bien dommage! Heureusement, «là n’est pas l’important», comme dirait l’autre… mais quand même…
- certaines énigmes moins fortes, comme celle de la maison hantée… Elle rappelle un peu plus la légèreté des énigmes très boboches des dessins animés de Scooby Doo, quand on était enfants… En un peu mieux, quand même! Mais de manière générale, j’ai un peu peur que les aventures qui seront vécues par le groupe de gamins soient un peu plus gnagna…
- les mini-strips dessinés par les assistants d’Aoyama, dans les pages finales. Comme tout mangaka, Gosho Aoyama travaille en collaboration avec quelques assistants (il le faut bien, s’il veut garder le rythme d’enfer – plus de quatre tomes par année – qu’il maintient depuis… 1994!!). De manière très courtoise (et pour les faire connaître, je présume), Aoyama demande à chacun de ses quatre acolytes de dessiner un strip vertical (Japon oblige!) qui met en scène toute leur équipe dans des situations saugrenues. Si je suis vraiment impressionné qu’un auteur laisse autant de place à ses subalternes, je le suis un peu moins par la piètre qualité des strips en question!! Ils sont visuellement très décevants… et l’humour qu’ils abritent est vraiment TRÈS quelconque, et beaucoup trop farci d’inside jokes! C’est réellement d’aucun intérêt!!
- les 68 (!!!) tomes actuellement accessibles en français (sur 76 en japonais, et ce n’est pas fini!!)!! Aurais-je le courage et la force de me rendre jusqu’à ces tomes?? Aoyama réussira-t-il à se diversifier suffisamment pour que je n’aie pas l’impression de tourner en rond?? Je ne sais pas du tout… mais ce que je sais, c’est que je vais lire les tomes #5 et 6 (que je me suis achetés en bouquinerie la fin de semaine dernière!!) et plusieurs des suivants avec beaucoup de délectation!! Pour la suite, qui vivra verra!
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