#02- ET TU REDEVIENDRAS POUSSIÈRE
Scénariste(s) : Xavier BÉTAUCOURT
Dessinateur(s) : Didier PAGOT
Éditions : Bamboo
Collection : Grand angle
Série : Chineur
Année : 2010 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre (2/2)
Genre(s) : Quotidien, Récit psychologique, Aventure policière
Appréciation : 4.5 / 6
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Souvenirs déterrés, grosses combines débusquées...
Écrit le vendredi 16 décembre 2011 par PG Luneau
Quel bonheur de retrouver le petit monde de Dain-sur-Souzon!! Le climat tranquille de cette petite bourgade est tellement bien rendu par messieurs Pagot et Bétaucourt qu’on prend vraiment plaisir à s’y replonger!
Gabin Kashenko, le brocanteur avec qui nous avons fait connaissance dans Tu es poussière, est maintenant considéré comme un véritable héros par tous les habitants de ce charmant village à l’allure faussement paisible. Après tout, c’est lui qui est parvenu à maîtriser le jeune Auguste Bousoir, l’individu perturbé qui séquestrait la famille du docteur Lemanant! Ce même jeune est d’ailleurs accusé de l’incendie criminel de la maison des Bousoir, qui aurait causé la mort du couple propriétaire! Finalement, c’est une bien bonne chose que Kashenko ait pu faire en sorte que ce fieffé voyou se retrouve sous les verrous!
Mais voilà que le jeune prisonnier s’enferme dans un mutisme malsain qu’il n’est prêt à briser qu’à la seule condition que Gabin vienne écouter son histoire! Et, on s’en doute bien, il semblerait que les apparences soient pas mal trompeuses dans toute cette affaire d’enfant donné, d’abus de pouvoir et de règlements de comptes à l’interne… Les notables de ce petit village semblent avoir bien des secrets cachés qu’ils ne désirent pas voir ressurgir!!! Kashenko aura intérêt à faire attention lorsqu’il brassera toute cette vase qui recouvre leur passé : il risque d’y dénicher quelques surprises… dont certaines, percutantes!
La deuxième (et dernière!) partie de cette enquête, encore bien plus palpitante que la première, m’a vraiment satisfait! J’ai vraiment beaucoup aimé suivre ce héros des plus originaux, au passé un peu trouble, apparemment, mais au présent bien terre à terre. Il est très bien incarné, bien crédible : il pourrait facilement être notre beau-frère, on n’a donc pas de peine à se laisser prendre par son aventure. La curiosité nous gagne donc immanquablement et nous pousse à terminer, vite, vite, notre lecture! Dommage que le dessin, bien que correct, soit un peu ordinaire, sans plus… S’il avait été un peu plus soigné, j’aurais donné un 5, mais quelques petites maladresses graphiques me laissent croire qu’un 4,5/6 est plus approprié.
Plus grandes forces de cette BD :
- les couleurs. Malgré mes quelques petits inconforts vis-à-vis le dessin, je dois avouer que j’ai quand même bien aimé la coloration, qui s’avère vivante (surtout dans les premières planches), sans être criarde. C’est un beau tour de force de Coralie Vallageas, qui rachète, dans une certaine mesure, l’aspect visuel.
- l’originalité du héros : un chineur, qui fouille dans les vieilleries des gens, mais aussi dans leurs secrets enfouis, par la force des choses. Brillant! Comment se fait-il que personne n’y ait pensé avant?! De plus, son histoire personnelle semble riche : on n’en a que d’imperceptibles bribes, pour le moment, mais on sent que le meilleur reste à venir! Sa copine et son beau-papa flic, manifestement d’origine antillaise, sont des personnages aussi sympathiques que bien exploités, scénaristiquement parlant.
- le climat. Le milieu décrit ressemble tellement à celui de la majorité d’entre nous qu’on ne peut que s’y sentir à l’aise : on est dans le quartier voisin, chez des gens simples et ordinaires. On sent un peu la même candeur, le même petit quotidien tranquille que dans les aventures de Jérôme K. Jérôme Bloche (Ce n’est sûrement pas pour rien que c’est Alain Dodier, le créateur de cette autre gentille série, qui signait la préface du Chineur tome #1)! C’est très différent des séries d’espionnage complexe, à la XIII, ou qui se passent dans l’univers de tous les multimillionnaires de ce monde, à la Largo Winch! Malgré que ces séries soient très bonnes, elles restent assez loin de notre petit monde... Du mien, du moins! ;-)
- la personnalité des divers villageois. Qu’est-ce que c’est chouette de retrouver le pilier de bar, le médecin, le châtelain, le directeur de l’institut psychiatrique, divers petits bums et quelques petits «pas vite»… Bref, toute cette faune presque stéréotypée que l’on retrouve dans tous les villages de la planète, de tout temps! Quel bon terreau pour des intrigues juteuses que tous cherchent à taire pour diverses raisons!! Là où il y a de l’homme, il y a de l’hommerie, comme dirait l’autre! Et j’adore la scène au resto, avec la commère, aux pages 17 et 18 : elle est littéralement jouissive!!
- une intrigue assez complexe mais somme toute clairement expliquée. Si je suis parvenu à tout comprendre, en m’appliquant modérément, tous les lecteurs minimalement exigeants devraient s’y retrouver… je dirais à partir de quatorze ans!
Ce qui m’a le plus agacé :
- le dessin de la couverture, qui transpose énormément ce qui se passe à ce moment-là dans le récit. Ça me dérange un peu quand une illustration de couverture bifurque du récit réel, quand il nous montre quelque chose qui n’est pas telle quelle dans l’histoire. Étrangement, j’y vois une forme d’iconoclasme!…
- un dessin un peu fade. Encore cette fois, les scènes de foule, en plans généraux ou d’ensemble, sont très bien exécutées (comme je le précisais dans ma critique du tome #1). C’est vraiment quand monsieur Pagot doit nous livrer des plans plus serrés, avec des visages, qu’il manque de constance. Ce n’est pas mauvais en soi, bien au contraire, mais on peut constater, en comparant les visages, de petites maladresses au niveau de la ressemblance d’une vignette à l’autre. On sent que c’est très ardu, que monsieur Pagot n’a peut-être pas encore la maîtrise parfaite des faciès de ses personnages. À mon sens, plus d’esquisses des visages lui auraient été nécessaires, pour qu’il se fasse la main.
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