#01- LES TROIS CHEMINS
Scénariste(s) : Laurent Chabosy dit Lewis TRONDHEIM
Dessinateur(s) : Sergio GARCIA
Éditions : Delcourt
Collection : Delcourt jeunesse
Série : 3 Chemins
Année : 2000 Nb. pages : 32
Style(s) narratif(s) : Récit complet
Genre(s) : Aventure fantaisiste
Appréciation : 4 / 6
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Trois petits contes tressés serrés
Écrit le mardi 30 août 2011 par PG Luneau
Ce matin-là, la toute mignonne Roselita sort de chez elle et tend les bras, espérant que son nuage à pains lui fournisse sa denrée comme il le fait tous les jours… Mais voilà qu’il est déréglé et qu’il pleut des cailloux!! C’est bien moins nutritif (et bien plus douloureux!!) que du pain! La fillette s’empresse donc de partir à la recherche du maître des nuages afin qu’il règle la situation…
Ce matin-là. John Mc Mac, richissime avare plus pingre que Scrooge, Harpagon, Picsou et Séraphin réunis, part pour aller réclamer les trois pièces d’or qu’il a prêtées à un de ses «amis» (c’est difficile de croire qu’un personnage aussi désagréable ait ne serait-ce qu’un ami!!). Pour lui tenir compagnie, mais surtout pour ne pas avoir à porter lui-même ses bagages, il requiert la compagnie de son serviteur, Robert, un pauvre bougre qui subit le caractère exécrable de son patron depuis des années… sans même être payé!!!
Ce matin-là, le robot H-Deuzio se retrouve dans une barque à la dérive, en plein milieu d’une rivière!! Quel malheur pour lui qui a une peur bleue que l’eau ne le fasse rouiller! Il n’a d’autre choix que de se laisser entraîner par le courant … Mais comment se fait-il qu’il ait abouti dans cette barque? Il n’en garde aucun souvenir, c’est le mystère total!!
Vous aurez compris que, ce matin-là, les trois chemins de ces voyageurs se croiseront et se recroiseront encore et encore, tout au long des 32 pages que dure ce charmant petit album destiné aux plus jeunes! Et ils se croiseront d’autant plus qu’on est ici en présence d’un album sans case!!! En effet, chaque double page nous montre, en fausses perspectives, les trois chemins qui serpentent et sur lesquels chaque protagoniste est dessiné une bonne dizaine de fois, un peu à la manière d’un zootrope (vous savez, ce carrousel à images, ancêtre des dessins animés!) qui nous montre l’évolution de leur déplacement respectif sur les différents trajets. On suit donc les trois narrations en parallèle… au sens propre du terme!! En cours de route, non seulement se rencontreront-ils à quelques reprises, ou s’échangeront-ils quelques items (dont le fameux nuage déréglé et la barque!), mais ils côtoieront tout un éventail de personnages divers : pirates, brigands, militaire, savants, paysanne et boulanger en tout genre, ainsi que toute une panoplie d’animaux. Toutes ces rencontres, souvent farfelues, ne sont pas sans rappeler celles du Petit Prince ou, mieux encore, celle de Dorothée au pays d’Oz! Le même charme opère, et les jeunes de six à neuf ans craqueront sûrement pour l’amusante fillette ou pour le robot le plus naïf de la planète… autant qu’ils adoreront détester l’égoïste Mc Mac et plaindront son dévoué sous-fifre!!
Les Trois Chemins, un album qu’on devrait retrouver dans toutes les bibliothèques des écoles primaires francophones!
Pour connaître l’avis d’un autre expert, je vous encourage à visiter le site de Yaneck, les Chroniques de l’invisible, avec qui je viens de faire ma première lecture-conjointe en carrière!!
Plus grandes forces de cette BD :
- le concept des trois chemins qui s’entrecroisent, sans cadre, en scènes «stroboscopées» dans un décor unique. Chaque personnage est donc dessiné plusieurs fois par planche, au fil du chemin qu’il suit… et qui entrecoupe celui des autres!! Évidemment, en page 32, la boucle est bouclée : les trois trajets reviennent à leur point de départ respectif… mais les protagonistes auront tous évolués, chemin faisant! N’est-ce pas le propre des voyages de nous faire… cheminer?!
- le foisonnement de petits détails graphiques, rehaussé par l’éclatement des vignettes. Car si les personnages et leurs accessoires sont redessinés en rafales, le décor se veut, lui, à peu près unique, et il fait toute la double page! C’est donc dire la grande quantité d’éléments que monsieur Garcia a dû parsemer, de-ci de-là, pour bien garnir tout l’espace : arbres et plantes divers, dunes et amoncellements de rochers, bifurcations, animaux de tout acabit, à plumes, à poils ou à écailles… C’est très riche, tout en laissant les trois trajets bien lisibles : c’était audacieux, mais c’est bien réussi!
- le personnage du robot. Il vole incontestablement la vedette, avec sa manie de tout interpréter de travers! C’est particulièrement flagrant par rapport à son amusante relation avec Roselita qui le prend pour un chevalier en armure mais que lui prend pour une ennemie qui en veut à sa «peau»!
- un humour familial bien sympathique, dont quelques petits gags discrets. C’est le cas, par exemple, du petit cochon qui se régale du sandwich au gromox… mais qui en meurt tout bêtement, à la page suivante! Seuls les lecteurs attentifs s’en rendront compte!
Ce qui m’a le plus agacé :
- la typographie souvent trop serrée. De manière générale, le lettrage est très irrégulier. De plus, les répliques ne sont pas encerclées d’un phylactère : elles sont simplement soulignées d’un tout petit appendice qui pointe vers le locuteur. Dans de telles conditions, quand les chemins se rapprochent et que les protagonistes se parlent tous pendant deux ou trois répliques, ça fait en sorte que les textes sont un peu coincés et que le lettreur n’a pas eu d’autre choix que d’écrire plus petit et plus serré… au point de parfois rendre la lecture difficile!
- une construction scénaristique qui tourne parfois les coins un peu rond. Certaines décisions importantes sont à peu près escamotée (c’est le cas quand la fillette entre dans le canon, par exemple). À d’autres occasions, ce sont les conditions qui se modifient sans crier gare, comme quand les deux pirates qui accompagnent le capitaine disparaissent aléatoirement du bateau, puis reviennent, sans aucune logique…
- l’absence de pagination! Encore! C’est une manie, ces temps-ci? Et tout ça simplement parce qu’on juge que les tout petits qui liront cet album ne savent pas encore compter, j’imagine!?! Ça rend très difficile la localisation précise d’événements ou de dessins, quand on échange sur l’album… comme dans une critique, par exemple!!
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