#01- COUP D'ENVOI
Scénariste(s) : Bruno DEQUIER
Dessinateur(s) : Bruno DEQUIER
Éditions : Dupuis & l'Équipe
Collection : X
Série : Louca
Année : 2011 Nb. pages : 80
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre
Genre(s) : Drame sportif, Fantastique humoristique, Quotidien, Aventure policière
Appréciation : 5 / 6
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Son fantôme d'amour lui donne des cours... mais pas de poterie!!
Écrit le samedi 01 octobre 2016 par PG Luneau
Tomes lus : #01 - Coup d'envoi
#02 - Face à face (2013, 68 p., 5,5 / 6)
#03 - Si seulement... (2014, 56 p., 5,5 / 6)
#04 - l'Espoir fait vivre (Éd. Dupuis, 2015, 64 p., 5,5 / 6)
Wow!! Quelle chouette série que celle-ci! Quel chouette héros que ce Louca! Vraiment, je misais de grandes espérances sur ces albums aux couvertures modernes, arborant des dessins classiques et bien léchés, comme ceux auxquels Barbucci, Canepa, Centomo et compagnie nous ont habitués depuis quelques années... Il y avait donc un gros risque que je sois déçu : c'est souvent le cas quand on a trop d'attentes... Mais ma lecture des 4 premiers tomes de Louca m'a prouvé que j'ai encore pas mal de pif!!
Dès le premier coup d'œil aux couvertures des Louca, on comprend qu'on est en présence d'une série qui traitera de soccer (oui, amis européens, je ne parlerai pas de foot, question de ne pas confondre mes compatriotes nord-américains... en espérant que vous comprendrez que c'est le même sport!!? ;^) Mais, contrairement aux traditionnelles séries traitant du ballon rond (je songe, notamment, au manga Captain Tsubasa, que j'ai déjà critiqué dans ici), les intrigues sportives (de type «gagnera, gagnera pas??») sont consolidées et égayées par trois éléments importants : un héros gaffeur et tordant, une petite romance sympathique et une touche de fantastique qui entraîne des tournures de l'ordre de l'investigation policière!! Wow!
Ainsi, on fait la connaissance du pauvre Louca, un looser assez pathétique (mais tellement drôle et charmant!! ;^) qui tente, comme tous les ados de 14 ou 15 ans, de se faire accepter de ses pairs... mais principalement de la belle Julie, pour qui son cœur bat en secret. Suite à une série d'imbroglios cocasses, Louca fait la rencontre de Nathan. Cet autre adolescent, ancien élève du lycée, était quelques années plus tôt la star de l'équipe de soccer... et la coqueluche de l'école!! Seulement voilà : Nathan a été tué dans des circonstances nébuleuses, et si Louca peut le voir, l'entendre et lui parler, il est bien le seul, car Nathan est un fantôme!! Puisque Louca est la première (et unique!) personne à qui Nathan peut parler depuis son décès, survenu quelques années plus tôt, il n'en fallait pas plus pour qu'une connivence se développe entre les deux jeunes hommes : Nathan devient un peu le conseiller de Louca le maladroit, et l'ex-joueur étoile enseignera les ficelles du métier à son protégé, essayant du même coup d'en faire le nouveau champion de l'école. Julie se laissera-t-elle attendrir??
Au fil des tomes, plusieurs retours en arrière nous feront revivre les dernières heures de Nathan, nous pistant de plus en plus sur les circonstances exactes de son décès, survenu dans des conditions plus complexes qu'il n'y paraît de prime abord...
Ces quatre tomes semblent former une forme de premier cycle. En les terminant, les principales intrigues trouvent un semblant de dénouement très satisfaisant... mais il est clair que quelques petits éléments ont déjà été mis en place pour étayer la venue du cycle suivant : le gros Coubi, qui invite l'équipe de Louca à un tournoi spécial, par exemple, et, surtout, la magouille immobilière qui semble être l'enjeu de la saison. Le directeur du lycée n'est pas net net dans cette affaire... et possiblement dans d'autres... Ne vous ai-je pas parlé d'intrigues à saveur policière?!! ;^)
Chose certaine, c'est vivant, drôle, palpitant, intrigant, les nombreux revirements sont surprenants... et le tout est superbement dessiné!! Quoi de mieux pour intéresser nos jeunes grouillants qui voient souvent la lecture comme une corvée??! Même les jeunes filles apprécieront!!
Louca, une valeur sûre... À partir de 10 ans, mais encore plus approprié pour les 12-14 ans...
Plus grandes forces de cette BD :
- indéniablement, le dessin! Il reflète, à mon avis, le parfait aboutissement de la BD franco-belge humoristique classique, tel que les Italiens formés chez Disney nous la servent depuis quelques années. Ça reste un style caricatural classique, qu'on retrouve souvent (dans la majorité des dessins animés, tant chez Pixar que chez Disney, justement!), mais, que voulez-vous : j'adore ce style!! Donc, c'était visuellement gagné d'avance, pour moi, cette série! ;^) À souligner : Dequier n'hésite pas à pousser l'exagération caricaturale à son paroxysme, lorsque ses personnages pètent leur coche, par exemple, en doublant la grosseur de leur tête lorsqu'ils se mettent à crier, ou lorsqu'ils supplient avec des yeux de Chat Potté! ;^D
- la thématique sportive. J'espère qu'elle saura attirer les jeunes sportifs, surtout ceux qui sont moins portés sur la lecture!
- la belle unité des couvertures. Je crois que c'est leur fond blanc qui fait en sorte que je les trouve si class! ;^)
- les remerciements, en exergue du premier tome. Ils sont rédigés sur une page de cahier ligné, et c'est Louca lui-même qui tient le crayon! C'est logique puisque c'est lui qui signe! ;^) «Je remercie tout d'abord les parents de mon créateur...» et tout le reste est formulé à l'avenant! Sympa! ;^)
- la séparation de chacun des albums en 3 actes. Cette façon de fragmenter le récit donne un peu l'impression qu'on assiste à une pièce de théâtre, ou qu'on écoute les épisodes d'une série télé. Ça rythme donc notre lecture.
- le clin d'œil hommage, dès la première vignette!! Louca fréquente le lycée André Quanfrin... Ce nom vous sonne des cloches?? ;^)
- une construction scénaristique très efficace. L'incipit du premier tome, sous forme de flash forward, est intrigant à souhait, et les punchs de fin de «chapitre» sont particulièrement efficaces : ils donnent juste envie de tourner la page sans tarder pour connaître la suite. Encore heureux que j'avais les 4 premiers tomes à me farcir en rafale, car je ne sais pas comment j'aurais pu tenir, entre les tomes 2 et 3!! ;^)
- le héros... totalement antihéroïque!! Dès le départ, dans les 20 premières pages du premier tome, on réalise que le pauvre Louca n'a rien pour lui... sinon une malchance crasse! Paradoxalement, bien sûr, ses déboires délirants (qui m'ont rappelé la série Bine!), déclenchent chez le lecteur un élan d'empathie impossible à réprimer! Comment résister à un tel gaffeur??! D'autant plus que Dequier l'affuble de tronches tellement délirantes de drôlerie!! ;^)
- le personnage d'Antin, le petit frère. Trognon tout plein, et en totale admiration devant son (looser) de frère, en qui il voit un Champion mondial en tout, toutes catégories confondues, il est l'image même de la naïveté et de l'innocence béate. On craque tous pour lui aussi, quoi! ;^)
- la double narration du premier match, dans le tome #1. C'est très amusant d'entendre d'abord la version d'Antin (telle que Louca la lui a racontée, de manière un peu subjective!!?), puis de revoir le même match, avec souvent les mêmes vignettes, mais avec les dialogues réels, et les éléments que Louca avait préféré élider! Ça donne une toute autre perspective au match!! ;^)
- de bons mystères intrigants. Primo, qu'est-ce qui peut bien lier Louca et Nathan de façon aussi intense pour expliquer que le premier soit la seule personne à pouvoir apercevoir le second?! J'espère que l'auteur a déjà songé à cet élément et qu'il saura nous convaincre... lorsqu'il en viendra à dévoiler ce secret!! ;^) Puis, tout le mystère entourant la mort de Nathan. Le scénario est construit à grands coups de (fréquents) retours en arrière, savamment agencés pour nous titiller, nous mettre parfois sur de fausses pistes et, toujours, nous donner le goût d'en avoir le cœur net! Surtout que plusieurs des protagonistes de l'entourage de Nathan sont toujours au lycée, autour de Louca!! Que de suspense!!
- le changement radical de look de Louca, à la fin du tome #1. Quel drôle d'énergumène que ce grand dadais!! Comment ne pas craquer, quand on le voit ainsi accoutré!! Si seulement l'habit pouvait faire le moine!! ;^)
- la présence, à la fin du premier tome, d'un carnet de croquis. Dequier nous y présente les différents personnages principaux, et y ajoute des études de mimiques et des petites indications. C'est un chouette complément.
- l'ampleur des tomes!! Le premier fait 80 pages!! Les autres? 65, 56 et 64 pages, respectivement. Bon, il faut quand même retirer les trois pages d'illustration des «actes», et leur verso! Mais ça reste généreux : on ne peut pas dire qu'on n'en a pas pour notre argent! Et le pire, c'est que ça se lit relativement vite : les vignettes sont généralement assez grandes, et la mise en page est très aérée. C'est très agréable!
- la présence de petits résumés des tomes précédents, au verso de la page de titre, et ce, dès le tome #2. Un bon coup de pouce pour ceux qui auraient manqué un épisode!
- l'effet d'aura autour de Nathan. J'aime beaucoup l'idée que le fantôme de Nathan soit dessiné comme tous les autres personnages mais que son contour ne soit pas encré de la traditionnelle ligne noire, au même titre que les autres! Lui, il est plutôt entouré d'un trait beige ou brun très pâle, ce qui assure sa «spectralité visuelle» !! Ingénieux et efficace! ;^)
- l'humour! Louca a tellement le tour de se mettre les pieds dans les plats!! Et quand ce n'est pas le cas, les situations font en sorte qu'il soit le dindon de la farce!! Les improbables postures qu'il arrive à prendre lorsqu'il pique ses fouilles sont littéralement bidonnantes (la Spéciale 4, à la fin du tome #3, est impayable!!)! J'ai aussi beaucoup aimé quand Cholé (la meilleure copine de Julie) reconnaît Louca en la personne du prétendu pervers à l'imperméable, ou quand l'auteur crée un suspense en stoppant une seconde pour l'étirer sur plusieurs vignettes, comme c'est le cas au tome #3, p.13!! C'est intéressant de voir comment monsieur Dequier parvient à nous faire rire, même lors certains moments de tension intense!
- les petits apartés scénaristiques, au cours desquels Louca s'adresse directement à nous, lecteurs, pour nous expliquer certaines de ses pensées... Dessinés dans un style graphique très enfantin, qui frôle le bonhomme-allumette, ces inserts brisent le rythme, ajoutent une bonne touche d'humour et nous permettent d'accéder à certains fantasmes de notre héros, qui s'y voit, par exemple, en champion du lycée ou en commentateur sportif...
- plusieurs personnages secondaires avec un fort potentiel. La prof d'arts plastiques, avec sa tronche d'illuminée et son exubérance d'artiste, est très amusante, et je perçois en Matt, le gardien de l'équipe adverse, un futur allié : sa manière de rester combattif sans sombrer dans la haine malsaine, et sa lucidité face aux débordements de certains de ses confrères (dont Hugo) laissent présager que son rôle prendra de l'ampleur dans les tomes futurs. Encore un autre : celui dont on n'a vu que les yeux... vairons!! Si l'auteur a pris la peine de masquer l'identité de ce mystérieux repêcheur sportif MAIS de nous montrer qu'il a des yeux si particuliers, c'est très certainement que ce personnage aura son rôle à jouer dans les tomes à venir! Intrigant, tout ça!?
Ce qui m'a le plus agacé :
- certaines valeurs véhiculées. Dès le premier tome, Louca est jugé trop pitoyable pour jouer au soccer avec les gars de son groupe. La «punition» choisie par son prof d'éduc? L'envoyer jouer avec les filles!! Quelle drôle d'idée!? Est-ce censé représenter la déchéance totale que de faire du sport avec des filles plutôt qu'avec des gars? Dans la tête d'un prof de gym un peu vieux jeu, ma foi, c'est bien possible! Autre valeur un peu discutable, surtout pour les plus jeunes lecteurs : la propension de Nathan pour la gent féminine, et sa manie de profiter de son invisibilité de fantôme pour... la reluquer alors qu'«elle» se change dans les vestiaires!! Évidemment, on épargne aux lecteurs le résultat de ces observations, mais ça demeure un geste sur lequel on ne devrait pas insister... même s'il reflète un intérêt véritable chez des ados de cet âge (15 ou 16 ans)...
- le caractère un peu carré des décors. Les bâtiments, les rues et les différents éléments qui s'y trouvent font très académiques. Ils sont bien réalisés... mais on peut presque sentir la règle qui a servi à tracer les diagonales des perspectives tant tout est trop léché! Le coin des édifices pourrait avoir quelques briques écorchées que ça n'en paraîtrait que plus réel!
- l'absence de ligne noire pour tracer les contours des phylactères. Ce choix artistique en vaut bien d'autres... Seulement quand ces phylactères sont sur fonds blancs, ou beige pâle, il; devient très difficile (ou même quasi impossible) de voir où se dirige l'appendice! :^S
- un gros mot... qui ne passera pas dans toutes les institutions scolaires! Les oreilles les plus sensibles n'apprécieront pas la phrase lancée par Hugo, le rival de service (et, accessoirement, le grand frère de Julie!!), à la p.46 du 2e tome... Elle ne s'explique que par l'ampleur de la colère dans laquelle le malheureux garçon se trouve. Ne répétez pas ça, les enfants!... Devra-t-on censurer l'album de l'école??!!
- une certaine lenteur narrative, parfois. Pendant ma lecture du tome #3, j'ai retrouvé un peu la même sensation que j'avais eue en lisant Captain Tsubasa. Quand la narration d'un match de soccer s'étend sur plus d'un album, il me semble que ça commence à s'étirer un peu!! :^S Fort probablement que les mordus ne seront pas de mon avis, mais personnellement, si j'avais été aux commandes, j'aurais tenté de resserrer un peu le tout.
- une péripétie plus difficile à avaler. Explications : Nathan n'a pas d'emprise sur le tangible... SAUF sur les objets appartenant à Louca. Il ne peut donc pas botter les ballons du lycée lors des matchs de soccer!! C'est pourquoi Louca a l'idée d'intervertir le ballon officiel du match avec son propre ballon, de manière à ce que Louca puisse l'aider discrètement!! Le problème, c'est que son ballon est chez lui! :^( Qu'à cela ne tienne : il demande à Julie et Antin d'aller le chercher!... Mais voilà le hic : la deuxième mi-temps du match est commencée!! Je trouve un peu fort que le bambin et la jolie brunette puisse faire l'aller-retour (et tous ses imbroglios!) en moins de quarante minutes... Disons que le scénariste a un peu tiré la ficelle, ici... :^(
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