#01- LES DÉBUTS DE JÉSUS Scénariste(s) : MATYO Dessinateur(s) : BAST Éditions : Soleil Collection : MDR:) Série : En plein dans le mythe Année : 2009     Nb. pages : 64 Style(s) narratif(s) : Gags en une case Genre(s) : Humour Appréciation : 4.5 / 6

Quel plaisir que de lire les Débuts de Jésus… complétés par ceux de Roméo! Issus du Lanfeust mag, ces dessins d’humour ne forment pas, à proprement parler, une BD. Ils se veulent plutôt un très intéressant remue-méninges humoristique sur ce qui aurait pu advenir lors d’un moment-clé d’un récit mythique universellement connu.

Ainsi, les créateurs Matyo et Bast s’amusent à imaginer, toujours en une seule case, comment la célèbre scène biblique du paralytique miraculé aurait pu se dérouler… si, par exemple, Jésus avait manqué d’ambition (Lève-toi et boîte!), s’il avait été plus zen (Profites-en pour méditer sur la vanité du mouvement.) ou s’il avait été trop porté à boire son eau… nouvellement transformée en vin (Levez-vous… HIPS!... tous les deux!)!

Bref, à l’image des géniaux Exercices de style de Raymond Queneau, c’est à plus d’une centaine de variantes de ce mythe que nous convient les auteurs, pour ensuite se pencher sur la scène du balcon de Roméo et Juliette, mais avec un Roméo ou trop fort en maths, ou trop manipulé par la pub, ou trop bête, ou trop optimiste…

Pour moi qui aie adoré le petit bouquin surréaliste de Queneau, cette série est un très beau cadeau. L’humour y prend toutes les tangentes (intello, burlesque, subtil, décalé, très rarement grossier…), et c’est ce qui, je crois, devrait faire en sorte que ce petit album soit apprécié par un très vaste lectorat, même par des gens que la BD n’intéresse pas en temps normal.

Un deuxième tome existe déjà, avec les débuts de Ève et d’Aladin, et un troisième s’apprête à sortir, avec les débuts de Moïse et du roi Arthur. J’ai déjà hâte de les lire!!!

Plus grandes forces de cette BD :

• la couverture semi-rigide et le petit format de l’album sont sympas et cadrent bien avec le style «recueil de dessins d’humour». Le dessin glacé, sur fond mat imitation cuir rouge, fait très «class».

• l’imagination du scénariste, pour toujours reprendre la même situation et imaginer plus d’une centaine d’alternatives à un mythe déjà archi-connu! Plusieurs sont vraiment très bien trouvées, j’ai ri et j’ai été surpris à plusieurs reprises.

• le graphisme caricatural très simpliste correspond tout à fait à ce style d’humour.

• l’absence de décor nous permet de repérer immédiatement les éléments récurrents (Jésus et le paralytique, Roméo et Juliette) pour ensuite mieux discerner les légères distinctions qui apportent l’éclairage nouveau à telle version par rapport à telle autre.

• les pseudo-citations, sous le titre de chaque double page, sont autant de superbes exemples d’Exercices de style, à la Queneau. On y relit, inlassablement, la même histoire, mais raconté selon l’œil (les croyances, valeurs et intérêts) de son auteur. C’est si bien fait que souvent, je cachais la signature, je lisais la version et je parvenais à deviner qui pouvait en être l’auteur! J’ai particulièrement aimé l’extrait de l’évangile selon Saint-Marx et ceux des évangiles selon Alzheimer, selon Francis (Cabrel!) et selon Thieuma (en verlan)!

• Les débuts de Roméo, sous le balcon de sa douce Juliette mais souvent aux prises avec son beau-père ou le molosse de la famille Capulet, nous sont offerts en complément : 24 autres pages de plaisir!

Ce qui m’a le plus agacé :

• le petit format des pages ne dessert pas bien les dessins. Il fait en sorte que les vignettes sont soit trop petites (quand elles font un quart de page) soit trop grandes (les quelques fois où elles sont en pleine page)!

• malgré les 64 pages, ça se lit très vite et on en voudrait encore et encore…

• certaines références culturelles qui me manquaient pour pleinement apprécier quelques uns des gags. (Qui est Jacques Delors ? Et Thierry Roland?...)