#01- CANCRUS SUPREMUS
Scénariste(s) : Anne et Gérard Guéro dits ANGE
Dessinateur(s) : Régis DONSIMONI
Éditions : Soleil
Collection : X
Série : Collège invisible
Année : 2001 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Récits complets
Genre(s) : Fantastique humoristique, Thriller fantastique, Hommage, Héros animalier, Humour parodique
Appréciation : 4 / 6
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À la mode de Poudlard... Clairement!
Écrit le jeudi 16 novembre 2017 par PG Luneau
Tomes lus : #01- Cancrus Supremus
#02- Furor Draconis (2002)
#03- Astralum Cauchemardem (2003, 56 p., 4,5/6)
#04- Duelum Magickum (2004, 4,5/6)
Ce n'est plus un secret pour personne : avec sa saga Harry Potter, J.K. Rowling a réellement chamboulé le monde de la littérature pour adolescents, en redonnant ses lettres de noblesse au récit fantastique! Depuis que ses romans ont montré à la face de l'Adolescent qu'il pouvait lire de gros bouquins, comprendre des histoires d'une certaine complexité et apprécier la magie, le surnaturel et la fantaisie, toute une manne de succédanés est entrée dans la parade! On ne compte plus le nombre de séries de romans, de films et de BD publiés depuis qui veulent profiter de la vague!
Dans le lot, on trouve la très agréable série du Collège invisible, écrite par un couple très prolifique : Anne et Gérard Guéro, qui officie depuis plusieurs années en tant que scénariste, sous le pseudo d'Ange. Pour qui raffole de ce genre littéraire (autant que moi!), il y a matière à jubiler! ;^)
Dans le premier tome, on découvre les gens du Petit Peuple (composé des lutins, des fées, des trolls et autres gobelins de tout acabit) réunis en conseil extraordinaire : ils doivent se trouver un nouveau Gardien officiel pour se protéger d'un danger éminent! Un commando spécial de trois lutins est envoyé au collège de magie le plus proche... collège qui se veut invisible et qui est inséré dans une (4e? 5e? 17e?) dimension secrète, au cœur même du placard à balais d'un collège tout ce qu'il y a de plus normal, dans une ville européenne contemporaine!! Le trio de lutins observera rapidement les élèves émérites de ce collège et, suite à un quiproquo, portera son dévolu sur le jeune Guillaume. Or, il s'avère que le dit Guillaume est probablement l'élève le moins doué du fameux collège!! Le pauvre garçon de 13 ou 14 ans devra faire preuve de beaucoup d'ingéniosité et miser sur la complicité de son pote Thomas pour parvenir à jouer efficacement son rôle de Protecteur du Petit Peuple... tout en restant vivant!!? :^0
Comme vous le voyez, cette série patauge dans le fantastique avec humour et reprend un peu le même canevas que la saga de Potter, mais elle s'en dissocie totalement, se contentant d'y rendre hommage de temps à autres par des allusions amusantes ou des clins d'œil savamment saupoudrés. On est loin du pastiche, comme c'est le cas avec la série Harry Cover que j'ai déjà critiquée, il y a belle lurette!! ;^)
Pour ce qui est des tomes suivants, Guillaume y affirmera, contre toute attente, son statut de héros en défendant son collège contre un gigantesque dragon venu d'un autre plan astral... et contre un inspecteur scolaire bigrement inquisiteur (tome #2), libérera tout un peuple de petits fennecs du joug de l'esclavage de la maléfique reine Kalika (tome #3), puis défendra l'honneur de son collège lors d'un grand championnat annuel contre... le collège de son cousin, un certain magicien très doué ayant une chouette comme animal familier et un rouquin comme meilleur ami (vous voyez, le genre?! ;^)...
Scénarii enlevants et bien ficelés, rythme soutenu, combats magiques d'envergure, revirements imprévisibles, humour bien dosé, originalité et fraîcheur, tout est là pour assouvir notre soif d'imaginaire! Et pour le visuel, Régis Donsimoni est parfait, alliant rondeurs et angulosités avec brio! En prime, on ajoute à cela les couleurs vivifiantes à souhait et les nombreux effets spéciaux (auras magiques, illusions en transparence, etc.) de Bouet, et on obtient une série franco-belge classique, de qualité irréprochable, qui saura satisfaire petits et grands, à partir de 9 ou 10 ans.
À lire aussi, sur le même sujet : la critique du tome #1, par Yaneck.
Plus grandes forces de cette BD :
- la qualité des dessins, surtout à partir du tome #2. Si ceux du premier tome sont parfois bancals (notamment quand les personnages sont montrés en légère plongée ou contre-plongée, auxquels cas ils ont le visage un brin trop étiré - voir aux p.13 ou 18), ils s'améliorent de tome en tome, jusqu'à faire preuve d'une très grande précision par la suite. Mon coup de cœur: la bouille de Radovar, au haut de la p.42, dans le tome #2!! ;^D
- les mises en pages dynamiques et modernes. J'apprécie la variété dans les formats et la disposition des vignettes: beaucoup d'inserts, de débordements, de plans variés... Le summum est atteint à la p.36 du tome #2, alors qu'une gigantesque chenille géante en vient à grignoter le cadre de sa vignette!! Très efficace!! ;^)
- le grand nombre de références à plein de séries-cultes, chères aux geeks! Outre Harry Potter, on passe de Star Wars au Seigneur des anneaux en passant par Alien, Astérix, Goldorak ou même Ma sorcière bien aimée (!!?): ça n'arrête pas! On peut même voir Hellboy à deux reprises (tomes #1 p.5 et #3 p.23), la chambre de Guillaume est décorée d'un poster rendant hommage à Miyazaki et un figurant du tome #1 lit son Lanfeust mag (p.22)! Autopromotions à souligner: plusieurs références à Némésis, une des séries S.F. écrites par Ange (voir notamment le graffiti sur la palissade de la p.6 - tome 1, et le t-shirt de Guillaume, sur la couverture du tome #2!!)
- l'évolution graduelle de la série. Plus les tomes s'accumulent, et plus on en apprend! L'univers s'enrichit et gagne en complexité (comme la série de romans Harry Potter, quoi!!? ;^). On découvre de plus en plus de personnages secondaires, et on creuse un peu plus la personnalité de ceux qu'on connaît déjà... À plusieurs reprises, Ange pige parmi des éléments mis en place dans les tomes précédents pour résoudre ou complexifier le récit en cours... Ça ajoute beaucoup à la crédibilité: j'adore! ;^)
- la coloration! J'en ai parlé plus haut, mais je tiens à le souligner à nouveau. Bouet est un virtuose, tant avec sa coloration normale qu'avec ses effets d'évanescence, de transparence, d'aura ou de fumée... Chapeau!
- une belle brochette de personnages secondaires intéressants. D'abord, le fait que Thomas, le meilleur ami de Guillaume, soit aux prises avec des transmutations en loup-garou dès le tome #2 est déjà pas mal chouette! Dragounet est supertrognon, de même que les Drims, ces genres de petits fennecs du monde astral: avec leur langage rempli de Rhoo! Rhoo! et leurs grands yeux implorants, ils sont tout simplement craquants!! Moins craquant mais tout aussi efficace dans son genre, c'est Rehorur Sundegaï, le professeur en charge des Na-Dragons du collège! Avec son bras amputé (mais il peut s'en faire apparaître un, translucide, dès que le besoin s'en fait sentir, ne vous inquiétez pas pour lui!!) et sa rigidité de caractère, voilà un personnage très puissant, dont on ne sait jamais trop vers quel camp il va pencher!! On a déjà commencé à en apprendre un peu plus sur son sombre passé, d'ailleurs!! ;^) Même chose pour Adrien, le rival de Guillaume, chiant, jaloux et vindicatif: lui aussi, il semble cacher quelque chose de louche... En somme, Rehorur et lui sont de très beaux électrons libres, qui offrent des tonnes de possibilités scénaristiques!! ;^) Dans un tout autre ordre d'idées, j'adore le geste de contrition des lutins, quand ils ont honte de ce qu'ils viennent de faire: ils se tirent les couettes avec un air de chien battu! On a tout de suite envie de tout leur pardonner! ;^)
- les sympathiques néologismes que la Reine des lutins lance à tout moment! Elle a le don (mais pourquoi seulement elle?!) d'employer des mots-valises fort chouettes, comme étrangebolesque (tome #1, p.7) ou Commenbinons tout de suite! (id., p.36)
- de belles scènes à l'intensité émotive surprenante en BD jeunesse. C'est le cas lorsque le brave lutin Sven vient au secours de son petit comparse Bibi (tome #1, p.41), ou quand Thomas se porte volontaire pour accompagner l'équipe qui part à la recherche de Guillaume, lorsque ce dernier s'est perdu dans le monde astral (tome #3, p.29). Quand l'amitié rend chevaleresque, moi, je craque toujours... ;^)
- les conclusions de chacun des albums. À chaque fois, la dernière planche nous piste vers l'aventure suivante, nous donnant de bons indices sur les activités ou les problèmes à venir, sur les menaces qui grondent... C'est la preuve que les scénarii sont bien orchestrés, que les auteurs savent où ils s'en vont. Qui plus est, ça nous donne automatiquement le goût de nous plonger dans le tome suivant: encore heureux que je les aie presque tous cumulés et que je n'aie pas à attendre un an avant que le prochain sorte! ;^)
- les formules magiques, d'inspiration latine! Tout comme les titres des différents tomes, les incantations lancées par les magiciens sont toutes formulées de façon à ressembler à du latin... mais un latin fort approximatif, si vous voulez mon avis!! ;^) Je n'ai jamais étudié cette langue morte, cependant il semble assez évident que Fossum Septicum Vidangum n'a rien d'officiellement latin! Mais quel plaisir on a à tenter de les interpréter, en se fiant au contexte!! Ça rappelle un peu les formules de Mélusine, la jolie sorcière de Clarke! J'y ai même appris les noms de joueurs de soccer dont je n'avais jamais entendu parler!!
- le carnet de dessins en hommage à la série. À la fin du tome #3, une douzaine de dessinateurs ont bien voulu se plier à l'exercice de dessiner qui un personnage de la série, qui une réinterprétation d'une scène-clé, qui une vision très personnelle de l'univers mis en place... Comme toujours, c'est amusant de voir des personnages qu'on aime sous la plume et le style personnel de quelqu'un d'autre! Et vive Larcenet et son collègue invisible!! ;^)
Ce qui m'a le plus agacé :
- la relative violence de certains combats. Celui qui clôt le premier tome nous montre des corps déchiquetés en deux, avec les viscères bien juteuses qui pendouillent... Ça peut quand même être impressionnant, pour les plus jeunes lecteurs, malgré le style semi-caricatural qui en amoindri l'impact! Dans le tome #3, déjà, le dessinateur est un peu moins explicite lors de l'attaque des mignons petits Drims par les Kapos à tête de rhinocéros: on y voit un cruel soldat balayer l'air de son marteau pour écraser un des petits fennecs sans défense... mais on nous épargne la vue du résultat de ce carnage! Il n'en reste pas moins que l'impact émotif en est au moins aussi troublant, même si on ne voit rien, car on aime ces petites bestioles! Pour ma part, je n'ai rien contre le fait que, parfois, on montre aux jeunes que certaines horreurs sont, malheureusement, inévitables... mais je sais que certaines personnes risquent de désapprouver. C'est surtout au niveau de l'âge du lecteur qu'il faut être vigilant, d'où ma recommandation: pas avant 9 ou 10 ans!
- une aberration scénaristique! Que le jeune Dragounet, avec ses toutes petites ailes, puisse agir comme parachute, quand Guillaume saute d'un toit par exemple, lui permettant ainsi de planer jusqu'au sol, ça peut passer... Mais qu'il puisse, à partir du sol, soulever le poids de son maître ET de deux lutins et voleter un peu partout lors d'un combat, comme à la fin du tome #1 (p.42), c'est pousser le bouchon un peu loin, non?!:^S
- de petites erreurs graphiques (répertoriées sur le site Placard à BD). Dans le premier tome, entre les p.8 et 15, les bandages aux poignets du petit Sven ont tendance à disparaître et réapparaître, selon que le dessinateur y pense ou les oublie! ;^) Puis, dans le tome #2 (p.11, 4e case), la bandoulière du sac de Thomas change subrepticement d'épaule!! De jolies petites erreurs d'inattention de la part de M. Donsimoni! ;^)
- l'insistance un peu trop marquée sur le caractère sexy de Mademoiselle Tabatha!? La série s'adressant aux jeunes, il n'était peut-être pas essentiel d'insister sur les courbes généreuses de cette enseignante, comme c'est le cas quand on la retrouve à moitié nue, après son combat contre le dragon, dans le tome #2 (p.38). Personnellement, je n'ai aucun problème avec le fait qu'elle soit sexy (son avatar astral, dans le tome #3, est d'ailleurs un genre de Venom aux courbes affriolantes!). À mon sens, Donsimoni s'arrête juste à la limite du bon goût avec Mlle Tabatha... mais peut-être que certaines lectrices plus engagées ne seront pas de mon avis et y trouveront à redire, surtout en voyant la Na-Dragon du collège de Péquaure qu'on découvre à la dernière planche du tome #3. Dans la lignée des combattantes sexies des BD d'heroïc fantasy, celle-ci est, malgré ses quelques pièces d'armures, exagérément dénudée, avec la culotte-bikini qui ne lui cache pas la moitié du pubis... Était-ce nécessaire? Soyez-en prévenus!!:^S
- des noms à la graphie changeante. La jeune élève d'origine indienne semble s'appeler Shéfali (tome #3, p.10 et 21), mais perd son accent aigu à la p.36!! De même, le coach des Na-Dragons du collège de Péquaure s'appelle Fitar à la p.18 du tome #4, mais Futor à la p.36. Un peu de rigueur serait appréciée... Sans compter l'horrible «dangeureux» que j'ai déniché dans la 3e vignette de la p.11 du tome #4!!:^P
- quelques petits passages moins clairs... Le combat entre les Na-Dragons des p.12 et 13 du premier tome n'est pas très fluide, par exemple, de même que l'ordre de lecture des phylactères de la 4e case de la p.24... Puis, dans le tome #3, comment se fait-il que Guillaume ne fasse pas de cas de la gigantesque sculpture que les Drims ont construite à son effigie?? Je l'avais personnellement remarquée dès la 3e vignette de la p.26!!? Finalement, il y a les p.24 à 27 du tome #4 qui me semblent un peu bancales. Les deux premières semblent sortir de nulle part: elles veulent nous expliquer un concept-clé de la défense du Collège de Péquaure, mais c'est assez obscur... Pour ce qui est des deux suivantes, je ne comprends toujours pas pourquoi les protagonistes font un si grand cas du fait qu'ils ne doivent SURTOUT pas s'arrêter??! J'aurais aimé qu'on m'en explique la raison!!:^S
- le changement de format, à partir du tome #4! Quoi de plus agaçant qu'une maison d'éditions qui décide tout à coup de raccourcir leur couverture??! Ainsi, les beaux albums du Collège invisible perdent 2½ cm de hauteur et 1½ cm de largeur! Juste au moment où les dessins commençaient à être de plus en plus réussis!! Grrr!:^(
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