#01 - HYPER OPTIMAL TECHNIQUE DEFENSE OVER GROUP
Scénariste(s) : Guillaume BIANCO
Dessinateur(s) : Guillaume BIANCO
Éditions : Soleil
Collection : X
Série : Hot Dog
Année : 2008 Nb. pages : 62
Style(s) narratif(s) : Gags en une planche (+ quelques p. documentaires)
Genre(s) : Héros animalier, Humour social
Appréciation : 4 / 6
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Chiens abandonnés de tous les pays, unissez-vous!
Écrit le samedi 20 février 2010 par PG Luneau
Avez-vous déjà entendu parler des centaines de chiens et de chats qui se retrouvent à la rue ou abandonnés en pleine campagne par leurs maîtres lorsque vient le temps des grandes vacances? Guillaume Bianco a manifestement été si choqué par ce phénomène qu’il a décidé d’en faire le sujet de sa série Hot Dog, diffusée originalement dans le Pif gadget «nouvelle mouture».
Dans un style souple et très caricatural (les personnages animaliers ont des bouilles impossibles!), monsieur Bianco nous raconte, avec énormément d’humour et de sarcasme, la triste histoire d’Oswald, un chien blanc à l’énorme truffe rouge qui réalise l’impensable : si sa charmante petite maîtresse vient de lui lancer la balle en criant : «Va chercher la baballe, Oswald!!», ce n’était que pour mieux filer en voiture et ne plus jamais revenir! Totalement dévasté, il mettra à peine une page pour transmuter son désespoir en haine farouche à l’égard de la bêtise humaine. Ainsi, dès la troisième planche, il recrute des chiens errants (et même un chat, Bradley, l’idiot de la bande!) qui ont subit le même sort que lui. Avec hargne et détermination, il tentera de mettre sur pied un genre de groupe terroriste animalier : le Hot Dog (pour Hyper Optimal Technique Defense Over Group). Le but de cette association? Pourrir la vie des humains pour se venger de toutes les humiliations qu’ils font subir aux animaux… à commencer par le joug de l’esclavage.
Le problème, c’est que Bradley et compagnie ont trouvé un charmant «foyer d’accueil grand luxe» chez une vieille dame qui prend soin des animaux abandonnés. Entourés de télés, lecteurs DVD, Internet… et nourris amoureusement de petits plats préparés, ils comprendront mal la haine viscérale du pauvre Oswald qui, emmuré dans ses principes, refusera ce gite et aura toutes les misères du monde à entraîner ses troupes vers la désobéissance…
Guillaume Bianco est un habile scénariste. Il le faut pour parvenir avec tant d’aisance à nous faire rire avec des sujets aussi graves. Car au fil de l’album, Oswald élargira son champ de bataille et découvrira d’autres raisons de nous haïr : pollution, contamination de l’eau, nucléaire, réchauffement de la planète, déforestation… Tout sera passé au crible, même les téléphones cellulaires! D’ailleurs, l’album de 62 pages comporte quelques pages pamphlétaires sur ces sujets chauds, des pages où l’auteur, par l’entremise d’Oswald, présente des capsules de textes informatifs où il exprime ses inquiétudes et tente d’éveiller notre conscience à grands coups de statistiques effrayantes… mais réelles!
Saurons-nous comprendre le message? Il serait peut-être temps!?!
Plus grandes forces de cette BD :
- l’hilarant contraste entre la hargne d’Oswald et la bonhomie des autres membres de son club. Melvin, Bradley, Pavlik et Piotr sont désopilants de désinvolture, ce qui détonne beaucoup avec le caractère enragé du pauvre personnage principal. Il s’en dégage un sarcasme des plus tordants qui a su me ravir. Car on a beau faire suivre un entraînement quasi militaire à ces pauvres bougres, la servitude behavioriste à laquelle ils ont été conditionnés depuis leur naissance est fortement ancrée en eux. La belle petite Solène, qui s’occupe parfois d’eux pour le compte de la mémé qui les héberge, en sait quelque chose : un «Au pied!» bien senti est encore ce qu’il y a de plus utile pour rameuter les pauvres soldats… au grand dam d’Oswald!
- les messages écolos. Ils sont un peu trop alarmistes, mais ça prend peut-être ça pour nous faire réaliser que, quand on file à deux cents kilomètres à l’heure, ce n’est pas juste en mettant les freins qu’on évite le mur qui est à cinq mètres devant nous! À quand une réelle prise de conscience planétaire et, surtout, des gestes concrets?
- les «gadgets technologiques» et les différentes techniques d’entraînement mis en place pour l’entraînement des troupes. À hauteur de chien, ils sont ingénieux et amusants : combien de temps pourriez-vous supporter, vous, de rester le nez planté dans la litière de votre chat, sans défaillir? C’est avec ce genre d’épreuves qu’Oswald endurcit ses bêtes… qui sont, justement, assez bêtes, merci!
Ce qui m’a le plus agacé :
- le sous-titre en anglais. Qu’est-ce que j’en ai ras-le-bol des œuvres françaises qui veulent se donner un air branché avec des titres en «angliche»… surtout quand on sait avec quelle désastreuse et horripilante prononciation nos cousins du Vieux Continent les disent!!! Dans le cas présent, heureusement, je présume qu’il s’agit de sarcasme. Je pardonne, donc.
- le choix d’avoir placé Basile sur la couverture. Ce personnage est un des moins intéressants de l’album, en ce sens qu’il ne cadre pas avec les autres. Alors que tous sont des animaux, lui est une entité née des déchets humains, qui vit dans une poubelle et qui rappelle beaucoup Oscar le grincheux, la bibitte verdâtre bouffeuse de déchets dans Sesame street.
- le graphisme du gros Stan. Ce chien, qui arrive plus tard dans l’album et dont on ne sait pas trop s’il est un simple copain des membres du Hot Dog ou s’il en fait partie en tant que membre à part entière, ressemble plus à une énorme mascotte en peluche bleue qu’à un chien. D’ailleurs, il dépasse tous les autres personnages d’une tête et semble, lui, avoir un foyer bien à lui. Un autre qui détonne du reste, et même sur le plan graphique.
- les gags avec Ben, le crocodile de toilette. En effet, non seulement Stan est différent des autres, mais monsieur Bianco lui fait vivre une série de gags récurrents où on le voit aux prises avec une bestiole qui sort du bol de toilette de sa demeure. Cette créature, un alligator ou un crocodile, a une ventouse à toilette plantée sur la tête, et semble se prendre pour un extraterrestre en exploration, ce qui crée une confusion sur sa nature réelle. De plus, il y a aussi confusion sur sa couleur : Stan dit à Oswald qu’il est vert, alors qu’il nous est toujours montré comme étant d’un brun pâle douteux. Ce sont les gags qui m’ont le moins intéressé de tout l’album.
- le tome deux, annoncé pour «la fin 2008… si tout va bien». Apparemment, tout n’a pas bien été puisque nous sommes rendus en 2010 et que rien n’est encore paru en ce sens. Il est vrai qu’entretemps, Guillaume Bianco, en plus de tenir un intéressant blogue, a fait publier, toujours chez Soleil, un superbe et très volumineux album anthologique qui a gagné plein de prix et qui semble très intéressant : Billy Brouillard. Mais alors, pourquoi nous faire saliver en nous laissant espérer? Serait-ce une revanche behavioriste qu’Oswald a décidé de nous fait subir ?!?!
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