#02- LE VILLAGE INVISIBLE
Scénariste(s) : Tony VALENTE
Dessinateur(s) : Tony VALENTE
Éditions : Soleil
Collection : X
Série : Hana Attori
Année : 2009 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre
Genre(s) : Fantastique médiéval nippon, Humour
Appréciation : 5 / 6
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le Charme des Ewoks, les méchants des Mystérieuses cités d'or
Écrit le dimanche 08 août 2010 par PG Luneau
Hana ne sait pas par où commencer sa chasse à l’homme. Elle, toute jeune ninja de quatorze ans, épaulée de ses trois complices (dont un, Shifu, qui ne cherche qu’à fuir!), n’a aucune idée des moyens à prendre pour atteindre le puissant seigneur Oda, cet horrible despote qui a tué sa sœur et son père.
Aussi, lorsqu’elle apprend qu’un de ses lieutenants revient d’Europe par bateau avec trois missionnaires conquistadors ET une arme secrète plus puissante que cent mousquets, la table est mise pour une mission d’espionnage et, qui sait, de sabotage qui mènera tout le groupe jusqu’à la très impressionnante Forêt des Bambous géants. Malheureusement, ils s’y feront capturer par les inquiétants habitants du Village invisible. Sauront-ils convaincre ces derniers de les libérer, ou même de les aider dans leur quête? Rien n’est moins sûr, car cette bande d’acrobates masqués déguisés en singes semble assez primitive…
Beaucoup de nouveaux personnages dans ce deuxième tome des aventures de Hana Attori. Outre le quatuor principal et le méchant Oda, présentés dans le tome #1, on fait la connaissance de quatre ou cinq méchants et deux ou trois alliés… Parmi les méchants, soulignons l’entrée en scène de Rikigaku, qui voudrait tant être considéré comme un professeur mais que personne ne prend au sérieux, et d’un missionnaire portugais à l’accent chuintant et aux pistolets redoutables. Tous deux semblent sortis tout droit des Mystérieuses cités d’or de notre enfance! Du côté des alliés, comment ne pas souligner la découverte du tout mignon Goa, le petit panda roux qui deviendra la nouvelle mascotte de Hana!
Valente nous présente ici un épisode riche en suspense. On y apprend certains aspects sur la magie des Ombres des enfers, et le tout se termine avec un mystérieux retournement et un horrible danger imparable qui menace Hana et ses amis. Bref, encore une fois, aventure, action, magie et humour se mêlent bien et forment un tout cohérent qui nous donne très envie de lire la suite!
Allez, monsieur Valente, à vos crayons!
Plus grandes forces de cette BD :
- la présentation des personnages, en début d’album. Un peu comme dans les albums d’Astérix ou de Jehan Pistolet, les principaux protagonistes ont chacun leur petit paragraphe donnant leur nom, leur âge, leur expression favorite ainsi que leurs points forts et leurs faiblesse. Ça met la table d’agréable façon, surtout pour quelqu’un qui n’aurait pas lu le tome #1.
- tous les dessins de Valente, mais encore plus particulièrement ses paysages si riches présentés dans des plans généraux d’une demi-planche. La Forêt des Bambous géants et le Village invisible qui s’y cache sont tout simplement sublimes. L’omniprésence du vert tendre du bambou donne une fabuleuse touche zen à tout l’album. C’est de toute beauté!
- Goa. Comment ne pas craquer pour un panda roux, probablement l’animal le plus mignon de la terre! On comprend Valente d’avoir voulu en donner un à son héroïne!
- le gag du bas de la page 30. Sans vouloir rien dévoiler, je dois avouer que je me suis laissé prendre, au même titre que Shifu… Moi aussi, je me suis mis, l’instant de trois cases, à échafauder des hypothèses complexes. Qui sont ces mystérieux espions? Mais quelle rigolade quand j’ai réalisé à qui on avait à faire!! Une petite bulle de bonheur que ce bas de page!
- les explications de Rikigaku sur le fonctionnement des portails des Ombres. Grâce à ce lieutenant d’Oda, on comprend maintenant mieux les limites de cette puissante magie. Le fait que ce pseudo-professeur ait un potentiel si limité, brillamment mis en évidence par le contraste entre son exposé et sa démonstration, rajoute au plaisir!
- les écouteurs de Goro. Quelle drôle d’invention que ces boîtes circulaires, contenant chacune un criquet chanteur, qu’on peut se mettre sur la tête grâce à un arceau de bois : voilà que les casques d’écoute étaient nés, en 1580!!!
- les fascinantes envolées des personnages, d’arbre en arbre ou sur les toits. On dirait qu’ils ont tous des ressorts à la place des jambes et un entraînement du Cirque du Soleil! Pour quelqu’un qui a toujours rêvé de voler, c’est magique. Les adeptes de «parkours», ces jeunes cascadeurs qui courent sur les murs et sautent par-dessus les édifices, ont de qui retenir!
- le double punch final. Il nous laisse dans le mystère total face à l’intervention salutaire de Chokki ET dans le danger jusqu’au cou… comme à la fin des épisodes de la série-télé Batman, dans les années 60! Cool!!
- les petits personnages manga sur la quatrième de couverture. J’imagine qu’il doit y avoir un nom spécial pour cette sous-catégorie de manga qui s’amuse à représenter des personnages en leur déformant les proportions, de manière à ce qu’ils aient l’air de petits nains à grosse tête caricaturale… mais je ne connais pas beaucoup l’univers manga, d’où mon ignorance. Chose certaine, c’est amusant : on les croirait tous retournés en enfance!
Ce qui m’a le plus agacé :
- les changements de format ET de collection. Sur son site, Valente explique qu’il avait demandé, dès le départ, que sa série ne soit pas dans la collection Soleil Levant parce qu’il la voulait tout public. Soleil Levant regroupe des séries d’inspiration manga, mais plus pour les ados/adultes. Alors, pourquoi les éditeurs ont-ils imposé la collection au tome #1? Surtout si c’était pour la retirer au tome #2? Sûrement pour accrocher au passage certains amateurs de Soleil Levant qui ne se seraient peut-être pas tournés vers cette série si le label de la collection n’avait pas été dessus… Une magouille de marketing dont on paie les frais! Mais pour ce qui est du nouveau format, je ne comprends pas : oui, d’accord, les albums plus petits coûtent moins chers… mais avec des pages de cette taille, chaque vignette rapetisse!! On perd donc de la qualité et de la précision. J’aime autant payer un peu plus cher et pouvoir profiter du grand talent de monsieur Valente, surtout que j’avais déjà payé pour le grand format du tome #1!! À quoi pensent-ils, ces éditeurs?
- la banalité de la couverture. Le dessin est très bien, on y aperçoit Hana avec Goa… mais elle fait vide! Et pourquoi sur fond rouge, alors que le vert domine tout l’album?
- le combat de la page 25. S’il est très impressionnant de voir le seigneur Oda à l’œuvre pour la première fois, il est très dommage que sa démonstration de force soit si difficile à suivre! Les effets de lumière sont magnifiques, encore une fois, mais j’ai dû la relire trois ou quatre fois pour finir par comprendre qui succombaient, et sous quels genres de coups!
- le personnage de Sanchez, à la page 28, et sa face cagoulée d’où sort une énorme moustache. Je soupçonne un clin d’œil à un héros de jeu vidéo quelconque ou à un personnage d’une série qui m’est inconnue, genre un lutteur de Lucha Libre ou quelque chose du genre. Toutefois, même si je ne peux l’identifier, cet homme manifestement hispanophone jure avec le reste des personnages.
- le clin d’œil assez maladroit à Lanfeust. À la page 28, lorsque vient le temps de baptiser son nouvel animal de compagnie, Hana songe à l’appeler Lanfeust, parce qu’il est roux, qu’il n’a pas l’air très futé et qu’il semble intimidé par les filles. C’est bien gentil à Valente de vouloir faire un clin d’œil au groupe qui lui a permis de publier sa nouvelle série (Lanfeust étant le fer de lance de la maison d’éditions Soleil), mais la manière dont il s’y prend est tout à fait malhabile et nuit à la cohérence de son univers : comment Hana peut-elle connaître Lanfeust, héros fantastique d’un monde irréel? Les albums de Lanfeust étaient disponibles dans le Japon des années 1580?!? Un peu de gros bon sens, s’il vous plait!
- une faute d’orthographe à la page 41. Les Portugais, nouvellement arrivés, s’expriment avec force de CHHHH… fouillez-moi pourquoi!! Tous les Japonais rient de cet accent improbable, ce qui rend les Européens furieux. Pourtant, alors que l’album est parsemé de «Ne riez pas de mon acchent!!», on retrouve un «acchant», à la page 41. Encore un vérificateur-correcteur qui tire au flanc!!
- la technologie européenne un peu trop avancée qu’on nous présente. Un peu trop forte, cette machine apportée par les Portugais. On n’est que dans les années 1580, quand même! Valente s’est peut-être laissé un peu trop impressionner par l’imbuvable film les Mystères de l’Ouest et ses impossibles robots-araignées!
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