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2013, l'année de la BD québécoise... jusqu'au musée!
Écrit le dimanche 09 mars 2014 par PG Luneau

Je ne suis pas le seul à le dire, et je ne serai probablement pas le dernier (quoique… je suis tellement en retard sur les autres que peut-être serai-je le dernier - j’aurais tant voulu publier ce billet il y a cinq ou six mois, en octobre ou novembre 2013, alors que l’effervescence était à son climax!! ;^) : la BD québécoise n’a jamais autant fait parler d’elle qu’en 2013!! Prenez l’ampleur de toute la médiatisation qu’elle a eue avec le petit survol suivant :

  • Michel Rabagliati, Guy Delisle et Delaf & Dubuc ont tous passé à Tout le monde en parle, le nec plus ultra en matière d’émission d’actualité culturelle.
  • La Presse a mis en ligne, sur sa nouvelle La Presse +, un dossier interactif très étoffé sur le neuvième art québécois. Mon ami collectionneur Michel Desgagnés y a d’ailleurs fait très belle figure, dans un reportage sur le monde fascinant des passionnés de BD!  (en voici au moins la version «papier», éditée plus tard)  Dommage que seuls ceux ayant un i-Pad aient pu y avoir accès! ;^(
  • Le Devoir, pour ne pas être en reste, s’est offert une très originale édition entièrement illustrée par des bédéistes plutôt que par les traditionnelles photos qui ornent les pages de tous les quotidiens de la planète (mon ami Marsi a d’ailleurs contribué à cette édition en réalisant quelques dessins!).
  • Plusieurs magazines ont fait leur une sur le thème de la BD, demandant généralement à un bédéiste d’en illustrer la couverture. Le magazine des libraires indépendants le Libraire (devenu depuis les Libraires) a été du nombre, avec son édition de fin d’année mettant en scène nos trois Nombrils préférées, Vicky, Jenny et Karine, en train de se les geler en attendant un autobus! ;^)
  • L’ouvrage tant attendu de Jean-Dominic Leduc et Michel Viau, les Années Crocs, a fait fureur partout où il passait, nous rappelant tout le bon temps qu’on a eu à lire en riant (ou à rire en lisant, en autant qu’on se souvienne que «c’était pas parce qu’on riait que c’était drôle!»), dans nos belles années de cégep. J’écrirai sans doute une chronique sur ce bouquin, que je suis en train de lire avec beaucoup d’intérêt!
  • Finalement, il y a eu tout le battage publicitaire entourant les festivités soulignant les 15 ans des éditions de la Pastèque, festivités trouvant leur apogée lors du vernissage de l’exposition la Pastèque au Musée, exposition qui se trouve à être le principal prétexte de cette chronique!

Mais tout d’abord, parlant de la Pastèque et de la situation de la BD québécoise, j’aimerais joindre ma voix à celle de Nicolas Fréret, un des trop rares journalistes spécialisés en BD, membre de l’ACBD et chroniqueur BD sur Canoë.ca. Il a signé, le 13 décembre dernier, un texte qui a fait bien des remous auprès des artisans du neuvième art.

Dans son texte, monsieur Fréret soulignait de belle façon le fait que bien des médias avaient tendance à considérer «BD québécoises» et «Éditions la Pastèque» comme étant de parfaits synonymes! Il y déplorait que la teneur de nombreux textes journalistiques, écrits par des confrères pas toujours connaisseurs du monde de la BD, incitait les lecteurs néophytes à croire que tout ce qui se fait en BD au Québec passe par la Pastèque : hors d’elle, point de salut!!

Pourtant, vous et moi savons que c’est absolument faux!! Tout comme monsieur Fréret, je crois que la Pastèque est une institution des plus importantes, chef de file en sa matière et hautement digne de tout le battage médiatique que son anniversaire a suscité… mais il faut rester conscient que notre Belle province produisait de la BD, bien avant la Pastèque! Les infrastructures n’étaient peut-être pas aussi efficaces que maintenant, les rouages manquaient souvent d’huile, beaucoup s’y sont cassé les dents, mais elle existait, grands dieux!

De plus, (et c’est sur ce point que monsieur Fréret conclut son article), nos bédéistes produisent bien plus que ce qui sort des imprimeries sous l’égide de l’incontournable cucurbitacée!! Parlez-en à nos dizaines d’artistes qui ont réussi à percer en Europe, via des éditeurs du Vieux continent, ou via d’autres petites maisons d’éditions québécoises moins glamour : Delaf et Dubuc, bien sûr, mais aussi Djief Bergeron, Yves Rodier, Jacques Lamontagne, Denis Rodier, François Lapierre, Jean-Sébastien Bérubé, Patrick Boutin-Gagné, Zviane, Jimmy Beaulieu, Francis Desharnais, Michel Falardeau, Philippe Girard, Denis Goulet, Niko Henrichon, Thierry Labrosse, François Miville-Deschênes, Gabriel Morrissette, Julie Rocheleau, VoRo…

Vous trouvez cette liste un peu trop longue? Je pourrais pourtant la continuer encore : Tristan Demers, Jacques Goldstyn, Serge Gaboury, Benoit Godbout, Kan-J, Michel Lacombe, Stéphanie Leduc, Caroline Merola, Raymond Parent, Yves Perron…

Bref, tout ce qui est excellent ne passe pas par la Pastèque!!

Mais comme les médias de masse ne sont pas très portés sur les nuances, plusieurs des artistes que je viens de vous lister passent sous le radar et ne font à peu près jamais parler d’eux, parce que n’étant pas rattachés, de près ou de loin, à la célèbre maison d’édition! En somme, c’est le principe de l’ombre et la lumière : quand on braque un spot sur un gros poisson, ça fait de l’ombre sur tous les petits poissons qui se trouvent aux alentours! Plusieurs de ces artistes le déplorent, d’autres l’acceptent comme inévitable… et certains préfèrent se rabattre sur le positif, se disant que dans notre monde si peu enclin à parler de BD, le moindre petit entrefilet, même sur un concurrent, ne pourra qu’avoir des répercussions sur les ventes de tous!

Mais j’ai envie de pousser plus loin l’exercice de monsieur Fréret, question de relativiser un peu le grand enthousiasme médiatique à l’égard de la maison d’éditions fondée et dirigée par Martin Brault et Frédéric Gauthier. C’est pourquoi je rajouterai un second postulat à celui que j’ai souligné plus haut… et ce, même si je sais que je me mettrai une bonne partie du système à dos en le faisant :

Tout ce que fait la Pastèque n’est pas excellent!!

Et voilà! C’est dit! J’ose affirmer que certains éléments du catalogue de l’illustre maison d’éditions me déplait, au risque de passer pour un plouc fini aux yeux de la clique branchée du monde culturel de la métropole (ou de Plateau… mais n’est-ce pas souvent la même chose?! :^)

Par exemple, j’ai beaucoup de difficulté à lire les critiques dithyrambiques qui pullulent présentement sur le Net et dans les magazines spécialisés à propos des albums jeunesse que la Pastèque publie depuis quelques années. (la Mer, Fourchon, Virginia Wolf, le Puits et plusieurs autres)… Je ne parlerai pas des propos ni de la prose de ces albums : je n’en ai lu aucun!?! Sûrement que ce qu’ils racontent mérite les bravos qu’on peut en lire… Ce qui m’horripile, c’est qu’on n’a de cesse de vanter la sublime beauté de leurs illustrations! J’avoue, ces albums sont d’une qualité technique irréprochable, et les dessins qui les égaient sont très jolis… pour un adulte nostalgique de sa jeunesse ou un poète qui sait en apprécier toute la subtile évanescence… Mais ces livres ne sont-ils pas supposés s’adresser à des jeunes??! Désolé, messieurs-mesdames les critiques-libraires-représentants des ventes et autres professionnels, maillons de la chaîne du livre d’ici : la plupart de ces «beaux» albums n’attireront pas le regard de plus de cinq pour cent de nos jeunes!! Et ce, nonobstant toutes les mentions ou les prix littéraires que vous seriez tentés de leur attribuer, avec vos yeux d’adulte!! Le sublime esthétisme privilégié ici est à cent lieues de leurs affinités, et il faudra se battre à grands coups d’animations spécifiques pour réussir à les faire apprécier par quelques-uns de nos enfants! Personnellement, en tant que responsable des achats de la bibliothèque de mon école primaire, j’y pense à deux ou même trois fois avant d’investir dans ces titres (qui ne sont pas donnés : la qualité matérielle et culturelle, il faut bien que ça se paie!!) et, la plupart du temps, je préfère ne pas les acheter, sachant qu’ils dormiraient sur les tablettes pour les quinze prochaines années! Tant mieux si une maman nostalgique ou un papa bien branché les procurent à leur progéniture : probablement sauront-ils les promouvoir adéquatement, dans le giron de leur cellule familiale. Mais pour ce qui de l’attrait intrinsèque de ces albums sur les rayons d’une bibliothèque, je suis plus que sceptique : visuellement, ils sont fades! Et j’imagine le tabac que susciterait plein d’autres albums-jeunesse d’ici s’ils recevaient ne serait-ce que la moitié du battage publicitaire que ces «beautés froides» reçoivent!!

Mais ce premier point m’a éloigné un peu de mon dada, la BD… En fait, pas tant que ça, finalement, et ma dernière doléance en ce qui a trait aux produits de la Pastèque vous fera comprendre pourquoi.

J’adore les illustrations de Pascal Blanchet. Très souvent inspirées des années 50 ou 60, elles sont racées, et me replongent avec bonheur dans les comédies de Doris Day ou de Jerry Lewis de mon enfance ou dans l’esthétisme des vieux Paris-Match ou des vieux Châtelaine qui traînaient au sous-sol!... Mais, aussi sublimes soient-ils, que font les albums de monsieur Blanchet dans les rayons BD??? Comment ont-ils pu remporter tant de prix à titre de… BD??!! Déjà que le neuvième art est méconnu du grand public, ce n’est pas en y mêlant des albums illustrés, même superbes, qu’on va aider à la démocratiser!! Ce mélange des genres m’agace royalement, d’autant plus qu’il semble cautionné par le système, qui «l’accepte» en y attribuant des prix… de BD. «Meilleur album illustré pour adulte de l’année», j’applaudirais haut et fort. «Meilleure BD»? NON!! Ça n’a rien à voir!

En fait, j’ai souvent l’impression qu’autant les grands succès de la Pastèque contribuent à l’essor de la BD au Québec, autant plusieurs de leurs produits, hybrides ou trop hermétiques, peuvent donner une image un peu trop snobinarde de ce que peut-être la BD d’ici. Oh! Je n’ai rien contre l’existence de tels produits : ils peuvent satisfaire une certaine clientèle, pour ne pas dire une clientèle certaine, aisée, éduquée, culturellement  branchée… Mais comme les médias, eux-mêmes issus de cette élite, présentent la Pastèque comme étant l’ensemble de la BD québécoise… ça pousse monsieur et madame tout le monde qui s’y risquent à croire que notre BD consiste en des albums léchés et difficiles à suivre, et si ça ne colle pas pour eux, ils préféreront retourner à leurs romans ou leur télévision! Si la série des Paul, de Rabagliati, connaît un tel succès, c’est parce qu’elle est accessible tant par le récit qu’elle raconte que par son contenu visuel. Ce n’est pas le cas de tous leurs titres! Qu’une maison d’éditions aussi solide ait le courage de prendre des risques en publiant des œuvres marginales ou expérimentales, c’est super… mais messieurs-dames des médias, présentez-les comme telles, pour l’amour! Et, tant qu’à y être, enlevez donc vos œillères et  sortez de vos ornières!!

Personnellement, j’ai une préférence marquée pour la BD populaire, accessible au plus grand nombre, pour les séries traditionnelles, quoi… Mais je m’ouvre peu à peu à la BD d’auteur, aux romans graphiques, aux exercices de style… Je m’y trempe de plus en plus, développant mes goûts comme on le ferait avec le fromage ou le vin… Je me risque, tranquillement, à essayer des choses, certaines que j’aime, d’autres moins… Ce que je déplore, c’est que les médias et l’élite culturelle du neuvième art ne semblent pas prêts à faire le chemin inverse. Ils m’apparaissent trop souvent comme une clique snobinarde qui lève le nez sur ce qui plait à la majorité. Ça crée un fossé difficilement franchissable entre les différents artistes et les infrastructures, et c’est bien dommage!

Bien évidemment, on retrouve le même clivage dans tous les arts (télé d’auteur vs téléromans de cuisine, théâtre d’été vs théâtre d’avant-garde obscur, musique classique ou jazz-fusion vs hit radiophonique, best-seller vs recueil de poésie post-moderne, film introspectif vs blockbuster…)… Je ne règlerai donc certainement pas la question ici aujourd’hui, mais je tenais à souligner que cette dichotomie suscite parfois de la rancœur, des jalousies et des rivalités qui, au bout du compte, finissent par nuire à tous les camps!!

Mais venons-en à cette fameuse exposition, et au bouquin que la Pastèque a publié pour souligner ses 15 années d’existence, bouquin qui peut gracieusement (enfin, pas si gracieusement que ça puisqu’il coûte presque 40$!!) servir de catalogue pour l’exposition en question.

D’abord, précisons que j’ai eu la chance d’assister au vernissage de cette exposition, puisque mon ami Marsi, auteur de Miam miam fléau (et de Colis 22, qui sortira d’ici quelques semaines, à la Pastèque!!), était l’un des 15 artistes invités à participer au projet. Celui-ci, rappelons-le, consistait à choisir une œuvre de la collection permanente du Musée des Beaux-arts de Montréal, puis à s’en inspirer pour élaborer une courte BD… qui allait être affichée, en contre-point de l’œuvre!

J’ai bien aimé le happening que fut ce vernissage, bondé comme il se doit… mais, comme l’a si bien exprimé ma copine Violaine : «Un vernissage, c’est fait pour être vu, pas pour voir!». C’était donc vraiment très chouette d’apercevoir ces 15 bédéistes entourés de leurs proches, tous pataugeant parmi les journalistes et les dignitaires. Les discours ont été éloquents et applaudis comme ils se devaient… Mais pour ce qui est de savourer les œuvres, de les voir de près, de loin, de s’en laisser imprégner le temps qu’on le voulait bien… et de bien visionner (de manière audible!) le petit film documentaire qui accompagne l’exposition, on repassera!! La foule était si dense que c’était très gênant de s’installer devant une planche exposée pour en observer les détails : on avait l’impression d’obstruer la vue d’au moins cinquante personnes à chaque fois. Alors pour ce qui est de lire les textes!!?...

J’ai, de beaucoup, préféré la visite que je viens d’en faire, samedi dernier, juste à l’ouverture du musée! Nous n’étions que cinq ou six personnes par salle!! Et comme l’exposition est gratuite, c’était véritablement les conditions idéales!!

D’abord, précisons que j’ai ADORÉ le concept même du projet! Que d’originalité on est amené à côtoyer en parcourant ces deux petites salles : en découvrant les œuvres choisies d’abord, toutes plus variées les unes que les autres, des œuvres que rien ne destinait à ce qu’on les retrouve au même endroit!! Beaucoup de toiles, bien sûr, mais aussi quelques sculptures, une eau-forte, une affiche et un tissu (??!)… de même que deux items de la collection d’art décoratif du Musée : une chaise et un… tourniquet de métro!!?? Les plus anciennes de ces œuvres datent des années ‘30, la plus récente de 1988 : on a vraiment droit à un vaste spicilège qui démontre l’étendue de la collection du Musée, de l’imaginaire humain… et de l’éclectisme des goûts qui ont poussé ces bédéistes à se tourner vers telle ou telle œuvre qui leur parlait d’avantage. Juste sur ce point, cette petite exposition est déjà intéressante!!

Mais quand on découvre les planches que ces œuvres ont inspirées, et qu’on prend le temps de bien les lire, on reçoit en plein visage la diversité des possibles!! D’abord, il y a la grande variété de style de ces artistes : certains ont un graphisme très léché (comme Marsi ou Blanchet) ou réaliste (comme Godbout, Eid et Colpron), d’autres des traits plus cartoonesques (comme Rabagliati, Simard ou Bordeleau); certains ont un rendu plus jeté (comme Siris) ou minimaliste (comme Doyon), d’autres misent sur une esthétique plus poétique (comme Arseneault ou Doisneau) pour se démarquer du lot… mais tous restent fidèles à ce qu’on connaît d’eux!

Puis, tout aussi fascinant que leur style, c’est la grande variété des angles avec lesquels ils ont exploité l’œuvre qu’ils ont choisie, pour s’en inspirer ou l’intégrer dans leur réalisation!! Encore ici, il y en a vraiment pour tous les goûts!! Seulement quatre ont intégré du texte à leurs planches (le muet, dans un tel contexte, étant une idée judicieuse), la moitié a misé sur l’humour… Arseneault, Siris et Eid ont choisi d’y aller avec des planches à portée sociale, alors que d’autres y sont carrément allés dans l’illustration didactique (comme Godbout) ou la tranche de vie, réelle (dans le cas de Nadeau) ou fictive (dans celui de Girard… du moins, je l’espère pour lui!! :^) … Évidemment, encore ici, on reconnaît bien les personnalités de chacun!!

Parfois, l’œuvre muséale pouvait m’intéresser alors que la transposition que l’artiste en a faite me parlait moins. D’autres fois, c’était l’inverse : j’ai adoré la planche exposée alors que l’œuvre me laissait plus neutre. Au bout du compte, toutefois, chacune de ces quinze combinaisons œuvres-BD a quelque chose de positif à nous offrir! Tous, grands comme petits, y trouveront notre intérêt.

Mes coups de cœur?? Après une analyse pointue de chaque œuvre et de chaque planche, je peux maintenant vous confirmer que mes quatre œuvres préférées sont les toiles Cycliste et corneille, de Colville (dont j’ai toujours adoré le style, nonobstant l’intérêt que mon ami Marsi y porte aussi!! ;^) et Solitaire, de Brooker, ainsi que le buste Mon frère, de Sylvia Daoust et l’installation Madame Blancheville rides again de Pierre Ayot.

Du côté des BD, mes médailles d’or vont pour l’œuvre du grand Rabagliati (amusante, conceptuelle, originale et d’un limpidité incroyable) et celle de l’injustement moins connu Pascal Colpron (pour son style – que j’adore – réaliste sans pour autant être surchargé, et l’amusante touche de fantastique inexpliqué).

Mon médaillé d’argent est Paul Bordeleau, avec son amusante façon de faire découvrir les musées aux enfants (j’ai bien aimé, aussi, le clin d’œil à messieurs Gauthier et Brault, directeurs-fondateurs de la Pastèque, que Bordeleau a discrètement introduits en tant que figurants sur sa première planche, de même que pour celui à Fred, le célèbre créateur de la série Philémon!!).

Pour le bronze, ça se bouscule au portillon : Jean-Paul Eid, avec son instructive narration sur les fameux hobos des années ‘30, Janice Nadeau et sa façon toute simple de nous raconter la romantique histoire d’amour de ses parents, Pascal Girard et son excursion in situ pour croquer la nature sauvage… et finalement Marsi (et oui, mon ami!!), avec ses trois planches conceptuelles, composées de manière presque mathématique, tant au niveau du fond que de la forme!

J’aurais ensuite attribué quatre médailles en chocolat : une à Patrick Doyon, dont je ne soupçonnais ni l’humour, ni la profondeur du style, derrière son apparente simplicité; une à Pascal Blanchet, pour l’élégance, la classe, le petit côté rétro à la Mad Man et la perfection de son style (… même si ce n’est pas de la BD!! ;^); une à Réal Godbout, pour la belle idée de montrer le même paysage à neuf époques différentes… et pour sa ligne claire, reconnaissable entre toute, très réaliste mais pourtant si caricaturale! (C’est une belle idée d’avoir intégré Marc-Aurèle Fortin en train de croquer sa future eau-forte, dans le coin de votre septième vignette!); et finalement une pour le désopilant Leif Tande, ce vilain garçon qui a triché, en choisissant quatre petites œuvres plutôt qu’une seule, comme tous les autres!! Si ses reproductions monolithiques et totalement statiques des quatre œuvres n’ont rien de transcendantes (il a eu l’audace de reproduire 24, 27, 36 puis 45 fois les mêmes vignettes, en noir et blanc!!?!), les phylactères qu’il y a ajoutés, pour nous transmettre les réflexions de ces œuvres, sont tout simplement désopilants!! J’adore l’humour de cet homme, que j’avais encensé dans ma critique de son Origine de la vie!

J’ai moins accroché aux planches des quatre autres artistes. Si j’ai bien aimé le concept à la base de la réalisation d’Isabelle Arseneault, concept aboutissant au renversement de la toile de Lemieux qu’elle a choisie, son style poétique m’a laissé un peu dubitatif (mais il ne faut pas le prendre personnel : la poésie et moi, on n’est pas trop copains!! ;^). En temps normal, Rémy Simard est un bédéiste que j’adore. Seulement, ici, je ne comprends ni son choix (un tourniquet – vous savez, ceux avec trois barreaux qui tournoient, comme pour entrer au parc Belmont ou dans le métro, anciennement! – et un peu rouillé, encore!!), ni son récit, d’une insipidité incroyable malgré son impeccable réalisation. Pour ce qui est de Siris, son style bon enfant ne m’attire pas particulièrement… Je me dois toutefois de préciser que la présence de couleurs, comme dans la version de ses planches qu’on retrouve dans l’album (alors que les originales, exposées au Musée, sont en noir et blanc) ajoute une toute autre dimension, qui m’a déjà plu un peu plus. Comme quoi un peu de couleurs peut parfois être très profitable à une œuvre!! Et pour ce qui est de monsieur Doisneau, disons que ses petits dessins à la Sempé, agrémentés de petits collages, sont tout mignons… Je les exposerais probablement dans mon salon avec fierté! Mais puisqu’ils ne racontent absolument rien, et que je ne comprends pas le lien qui les unit à l’œuvre choisie (œuvre qui en est une de bien peu d’intérêt, à mon sens)… c’est malheureusement à lui que j’offrirais le bonnet d’âne… On parlait bien de BD, non??

Voilà donc pour ma visite au musée, pour mon coup de gueule contre la médiatisation intempestive d’une institution un chouia trop élitiste et pour mes impressions sur 2013. Au bout du compte, je ne sais trop si les historiens du neuvième art vont le soulever expressément, mais je crois qu’il serait dommage qu’ils ne rPastèque 15 anséalisent pas à quel point 2013 est à marquer d’une pierre blanche!! En effet, selon moi, non seulement ce fut une année bédéesquement fastueuse, mais au même titre qu’on a parlé du printemps de la BD québécoise pour désigner les années 70, on devrait considérer 2013 comme son été annonciateur de récoltes ou même son automne riche en produits de toutes sortes!... Quel dommage que je ne sois pas historien : ce serait fait!! ;^)

 

Exposition «la Pastèque au Musée»

Musée des Beaux-Arts de Montréal

Dépêchez-vous : jusqu’au 30 mars 2014!!

Gratuit!!

 

Livre La Pastèque – 15 ans d’éditions

Collectif

Éditions la Pastèque

Année : 2013

Nombre de pages : 272

Appréciation : 4,5 / 6

 


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@ Venise : Merci, Venise, pour ta façon toute simple de tout relativiser! C'est vrai que ce qui est in, généralement, fait vendre, et que l'argent est le moteur de (presque) tout! Donc, ceci expliquant cela, tous (médias comme libraires) préfèrent mousser le in, souvent au détriment du reste... qui mériterait tellement, pourtant, d'être considéré comme in à son tour, pour la santé du neuvième art québécois en général!!
J'aime bien, aussi, ton commentaire sur les livres jeunesse de la Pastèque! Tu mets en plein le doigt dessus : ils s'adressent plus aux enfants en nous qu'aux enfants actuels! Souhaitons-leur que le transfert des premiers aux seconds s'effectue le plus naturellement du monde.
Pour ce qui est de l'exposition, je constate qu'on a pas mal les mêmes goûts : tes trois coups de coeur sont mes deux médaillés d'or et l'un de mes médaillés de bronze! Et je suis très content que l'oeuvre de monsieur Doisneau ait trouvé des défendeurs : d'ailleurs, je n'ai jamais douté de ses qualités intrinsèques, ni de celles d'aucune des autres oeuvres de l'expo! Ce n'est pas pour rien que j'ai tant d'ex aequo dans mon palmarès!! L'écart de pointage entre mes premiers et mes derniers reste assez minime, et malgré certaines incompréhension de ma part, toutes avaient incontestablement leur place dans un musée... Et crois-moi, je ne dis pas ça de tout ce qu'on retrouve dans ces institutions : tu me connais assez pour le savoir, non??!! ;^)
Rédigé par PG Luneau le dimanche 23 mars 2014 à 9:44


Ah, j'ai la tête qui déménage de t'avoir lu attentivement et complètement. Ta parenthèse sur l'approche des médias sur la bande dessinée au Québec vaut amplement un billet en soi. Ensuite, il y a ta critique pointilleuse sur l'exposition. Deux billets mais une seule tête, la mienne ! Mais j'y suis arrivé !

Par contre, tu ne devras pas compter sur un commentaire approfondi sur ta parenthèse édifiante. Je vais tomber dans de l'ultra simplicité, il me semble que ça devrait aller de soi de la part des médias de fouiller plus loin qu'une seule maison d'édition. Ils sont "in" que veux-tu et on dirait que c'est tellement contagieux. Il n'y a pas que les médias, les libraires également mettent toujours de l'avant La Pastèque, leur réputation les devance. Il est question de réputation, de ligne éditoriale marquée, de qualité d'albums par la forme. Par le fond, c'est une question de goût. Je te comprends de t'insurger, tu défends la BD populaire et il en faut des personnes qui la défendent.

Leurs albums pour enfants n'a pas nécessairement l'air de s'adresser aux enfants, mais à l'enfant dans l'adulte. Un peu comme le livre de cuisine L'appareil n'avait pas l'air de s'adresser aux mordus de livres de cuisine !

À quand maintenant, la BD qui s'expose au Musée, c'est à dire dans son ensemble !

J'ai beaucoup apprécié ton ordre de préférence des 15 oeuvres et, comme toi, je n'ai pas très bien saisi la portée, ou même la signification des collages et pourtant, c'est la préféré de Tristan Malavoy Racine et il l'a défendait très bien.

Mes préférées sont : le Hobo de Eid, Le Frère de Pascal Colpron et l'incontournable de Michel Rabagliati.
Rédigé par Venise le samedi 22 mars 2014 à 23:30


@ Danielle : N'hésite pas à y retourner, chère Dan : ça en vaut vraiment la peine (surtout à ce prix-là!!). Vite avant que l'exposition ne soit démontée... ou avant que, dans ton cas, le rush de l'érable ne débute!!! :^)
Pour ce qui est de ta précision, sache qu'elle était, bien évidemment, intrinsèquement incluse dans mon allégation!! Je ne voulais certainement pas dire que «Tout ce qui est excellent ÉVITE la Pastèque»!! :^) Ils ont plein de titres très intéressants et prennent parfois de beaux risques avec des artistes marginaux, en plus d'avoir débuté, il y a quelques années, un remarquable travail patrimonial en rééditant des oeuvres importantes des années 80 (avec tous les Michel Risque, les Red Ketchup et, très bientôt, les désopilantes BD de Gilles Cloutier!!)... Donc, tu as parfaitement raison : il faut comprendre le sens de ma phrase comme si le mot NÉCESSAIREMENT y était écrit. Et idem avec mon deuxième postulat! Vous devez y comprendre : Tout ce que fait la Pastèque n'est pas NÉCESSAIREMENT excellent... Ce qui est aussi une évidence! Primo, parce qu'aucune maison d'édition n'est infaillible. Secundo, parce qu'aucune oeuvre ne peut satisfaire tout le monde!... J'imagine que même eux seraient d'accord avec ça!! Pourquoi ai-je l'impression que les médias in n'oseraient jamais l'avouer?!?!
Rédigé par PG Luneau le lundi 10 mars 2014 à 16:40


Merci Pierre-Greg! Tu m'as vraiment donné envie d'y retourner. J'avais moi aussi déploré la trop grande affluence qui m'empêchait de m’attarder aux œuvres, quand ce n'était pas carrément de m'en approcher!

J'apporterais cependant une petite nuance à l'une de tes allégations en y ajoutant un simple petit mot. Quand tu dis : "Bref, tout ce qui est excellent ne passe pas par la Pastèque!!", je dirais plutôt : Bref, tout ce qui est excellent ne passe pas NÉCESSAIREMENT par la Pastèque. ;)
Rédigé par Danielle le lundi 10 mars 2014 à 10:18


@ Anne des Ocreries : Merci bien!!
Rédigé par PG Luneau le dimanche 09 mars 2014 à 19:52


Ah la vache ! voilà un billet bien nourrissant !!!
Rédigé par anne des ocreries le dimanche 09 mars 2014 à 13:38




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